Twisted fables, un jeu qui conte ?
Unmatched, Exceed, Throne Dice, Street Fighter… le jeu de combat un contre un avec personnages asymétriques est un genre à part entière. Un genre qui a, a priori, tout pour me plaire mais à côté duquel je suis globalement passé. Alors quand on me propose un tel jeu avec une mécanique centrale de deck-building et des adversaires originaux qui, a priori toujours, n’ont pas de raisons de se mettre sur la tronche, je dis go ! Sur le papier, c’est ce que propose Twisted Fables (Gang Wang & Xiang Gao) alors regardons en détail ce que cela donne.
Twisted Universe
Commençons par ce qui saute aux yeux : le thème. Twisted Fables fait parti de ces jeux où les hommes sont complètement absents. Des versions « tordues » (twisted) des personnages de contes de fées doivent s’affronter : Blanche-Neige devient une sorcière zombie, le Petit Chaperon Rouge un cyborg, Mulan se présente en soldate de l’espace avec un bras robotique… Bref, des personnages assez badass, et dans l’idée, c’est chouette. Malheureusement, on n’est pas du tout dans un One Deck Dungeon côté démarche. Toutes nos guerrières sont représentées avec des mensurations de top modèles. Ce qui, à la limite, n’est pas un problème car pour certaines cela ne les empêche pas du tout d’avoir un style guerrier approprié : Alice et Blanche-Neige (ci-dessous) par exemple ne sont pas du tout sexualisées et ont un côté dur à cuire qui colle bien au sujet.
Malheureusement d’autres sont plus problématiques. Pour certaines, on peut douter de la pertinence de leurs tenues. Vous vous rappelez Mulan en soldate de l’espace ? Là où on aurait pu imaginer, par exemple, une armure de type space marine ou au moins quelque chose adapté à l’espace, on se retrouve avec une soldate qui se bat manifestement… en sous-vêtements. Et je ne parle pas de la Petite Sirène qui oscille entre représentations monstrueuses (que je trouve assez réussies par certains aspects) et positions dignes d’une pin-up.
La palme du mauvais goût revenant à cette illustration de la petite fille aux allumettes :
Bref, c’est dommage, le jeu rate une belle occasion, d’autant que la majorité des illustrations reste chouette. Mais malheureusement pour le jeu, ce parti pris pourra rebuter.
Il était une façon de jouer
Passons maintenant au cœur du jeu. Le but est de vaincre son adversaire, et on l’affronte sur une seule dimension, comme dans un jeu d’arcade, les sauts en moins. Je vous l’ai dit, nous avons ici une mécanique de deck-building. Pour composer celui-ci, nous aurons d’abord un marché de cartes de base : attaque, défense et déplacement, chacune de niveau 1 à 3, plus une carte bonus joker. C’est l’utilisation de ces effets basiques qui nous permet l’achat de cartes : si j’augmente ma défense de deux avec une carte de base, j’ai deux unités d’achat, idem si je fais deux déplacements, etc.
L’asymétrie vient des cartes propres à chaque personnages. En effet, chacune aura un marché de cartes « pouvoir » qu’elle seule peut acquérir. Celui-ci est composé de trois paquets : chacun d’eux associé à une action de base. Là aussi, on aura une seule action par paquet, avec trois niveaux de puissance. Les cartes sont ordonnées, et chaque fois que l’on a acheté suffisamment de cartes dans un paquet, on débloque également des pouvoirs permanents.
Le twist important du jeu car il y en a un, c’est que, pour pouvoir être utilisées, ces cartes pouvoirs doivent être jouées avec une carte basique du type associé. Plus les deux cartes seront de niveau élevé, et plus leur combinaison sera puissante.
Dernier élément de personnalisation de nos personnages : quand notre compteur de points de vie tombe en dessous de la moitié de sa valeur de départ, on a droit à une carte spéciale à choisir parmi trois (on dit donc adieu aux deux autres), qui représente un peu le mode furie du personnage.
Voilà à-peu-près tout ce qu’il y a à savoir sur la mécanique du jeu !
Un jeu fait pour les enfants ?
Derrière des règles relativement simples, Twisted Fables se démarque par quelque chose d’inattendu : il est assez exigeant. Là où on aurait pu imaginer quelque chose de très arcade (je joue toutes les cartes de ma main sans me poser de questions), la construction du deck est en réalité assez fine, justement car il faut faire comboter entres elles les cartes basiques et les cartes pouvoirs. Si on prend trop des dernières, on aura des mains inutiles. De plus, les effets des cartes pouvoirs ne permettent pas l’achat de nouvelles cartes. Mais pourtant on a envie de débloquer les pouvoirs permanents… Jouer sa main n’est pas forcément évident car cela dépend de notre position et de celle de l’adversaire.
Il n’y a pas non plus vraiment d’action « basique » sur laquelle on peut faire l’impasse. L’équilibre n’est pas facile du tout à trouver. Ajoutons à cela que l’on aura quasiment aucun effet de pur « deck-building »: pioche, épuration de deck, manipulation de l’ordre des cartes… Certes, on pourra éliminer une carte si on passe un tour, mais c’est plus un lot de consolation qu’autre chose lorsque l’on a une mauvaise main. La construction de notre deck va donc dépendre très fortement des cartes que l’on achète, et une erreur sera difficile à rattraper.
Néanmoins, pour qu’un jeu comme celui-ci fonctionne, il faut que les personnages aient suffisamment de personnalité et de différences pour que l’on ait envie de passer de l’un à l’autre. Et bien le jeu tient ses promesses de ce point de vue. Chaque personnage ayant ses propres cartes pouvoir, chacune sera vraiment unique à jouer, au moins en ce qui concerne les cinq personnages que j’ai pu jouer et voir jouer pour le moment : Le petit Chaperon rouge tape très fort et de loin mais a peu de défense, Blanche-Neige va empoisonner son adversaire petit à petit, Kaguya a tellement de défense qu’on aura du mal à lui faire des dégâts et Alice devra jongler entre ces trois différents aspects.
Et ça ne s’arrête pas à cela : non seulement les personnages sont toutes différentes, mais il y aura plusieurs façons de jouer chacune d’elles. Est-ce que l’on va se consacrer à un seul type de pouvoir pour débloquer les effets permanents les plus puissants ? Et dans ce cas là, lequel choisir ? Est-ce qu’on en choisi deux ou trois, pour être plus polyvalents et avoir des pouvoirs permanents plus nombreux mais moins puissants ? Est-ce qu’on abandonne la défense au profit de la mobilité ?
J’ai le sentiment que chaque personnage va demander plusieurs parties pour qu’on le maîtrise, en fonction de ses forces et faiblesses, mais surtout en fonction de son adversaire. Après chaque partie, j’ai eu envie de rejouer le personnage que j’avais joué pour voir si j’arrivais à faire mieux. Autant dire que même avec seulement six personnages dans la boîte de base, on aura plusieurs parties devant soi avant d’avoir fait le tour du jeu. Les extensions en rajoutent quatre, ce qui peut valoir le coup si on aime bien varier les combinaisons.
Puisqu’on parle d’extensions, je n’ai pas encore eu l’occasion de les essayer, mais elles rajoutent des choses qui me semblent assez intéressantes : outre les combattantes supplémentaires, on trouvera d’abord un mode à quatre. Celui-ci rajoute une dimension stratégique où l’on va alterner d’un adversaire à un autre qui me fait très envie. On aura également un mode où des objets seront placés sur les cases, ce qui là aussi semble rajouter une dimension stratégique, mais je dois dire que je suis un peu dubitatif sur celui là. À voir !
Elles vécurent longtemps et heureuses ?
Tout n’est malgré tout pas tout rose dans cet univers déformé. Au niveau de l’ergonomie, le jeu pêche un peu : on l’a vu, les cartes sont toutes de trois niveaux différents et sont liés à une des trois actions de bases. L’éditeur a donc choisi un code couleur pour les cartes en fonction de leur niveau. Si cela marche très bien pour les cartes pouvoirs, au niveau des cartes de base on ne voit pas du premier coup d’œil à quelle action elles se rattachent, alors que leur niveau lui se voit tout de suite de toute façon grâce au nombre d’icônes. Rien de rédhibitoire mais parfois c’est un peu gênant.
Reste que j’ai vraiment accroché sur ce Twisted Fables. Comme je l’ai mentionné, il est exigeant, ce qui à mon sens ne se voit plus si souvent dans les deck-buildings. Si on peut y jouer facilement car les règles sont très simples et que l’on aura pas des tonnes d’effets, bien y jouer sera une autre paire de manches. Sur nos premières parties, on aura envie d’aller chercher les cartes pouvoirs, ce qui peut s’avérer une grave erreur si on a pas assez de cartes basiques pour les alimenter et les renforcer.
La mise en place est rapide ce qui permet de sortir le jeu facilement et de s’amuser tout de suite, avec des sessions assez courtes. Son premier frein sera peut-être le style de certains personnages, qui pourra rebuter. Mais ce serait dommage de s’arrêter là car c’est vraiment un jeu qui moi me donner envie d’y retourner !
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