Trop de morts peut-il tuer la mort ?
De Walking Dead à Zombieland, de Max Brooks aux Zombie Walks, on le voit de partout. Il est mal rasé, il sent le bouc, sa cravate est toute de travers, pire, il ne sait même pas se servir d'un smartphone ! Et pourtant. Il est définitivement fashion. Regardez autour de vous, en ce moment même, vous êtes cerné j'en suis sûre (c'est mal de lire au boulot). Et ça tombe bien, c'est le principe du zombi d'arriver en masse !
Oui, mais. Parce que dans la vie il y a toujours un oui mais. On est en droit aujourd'hui de se poser cette pénétrante question : « trop de zombis peut-il tuer le zombi ? » (Tuer un cadavre mort n'est pas chose familière a priori, je connais néanmoins plein de personnes qui pourraient vous en parler pendant des heures.)
Nous, pauvres joueurs, ne sommes pas épargnés par l'armée des ombres, jugez plutôt : les Zombie Dice, Walking Dead, Humans !!!, Last night on Earth, Les Morts aux trousses, Munchkin Zombies, Off the dead, ZIMP, ou encore le très vénérable Zombies : la blonde, la brute et le truand, -oui, et j'en oublie-, bref ! Les étales étaient déjà pleines de revenants et voilà encore du nouveau mort tout frais avec d'une part, City Of Horror, et d'autre part : ZOMBICIDE ! Un nom qui fait pas rire, surtout quand on l'écrit en gros comme ça.
Monsieur Faidutti n'a pas tort quand il blog : « Les pingouins, ça va, c'est mignon – mais les zombies, ça pue. » Bon cépafo Bruno, ça commence à en faire beaucoup. Par contre, pour ce qui de comprendre les fondements de tout cet engouement, moi je trouve plutôt cela passionnant. De ses origines vaudous (le zombi était un esclave victime des drogues hypnagogiques d'un prêtre vaudoo) à sa symbolique politique (depuis « Zombi » de Roméro sorti en 78, jusqu'à très récemment, avec le mouvement des Indignés), son parcours est riche en métaphores et révélateur de la déshumanisation de la société qui l'entoure.
Mais bon, ceci mériterait un article (voire une thèse) à part entière.
En tout cas, j'étais dans cet état d'esprit ambivalent quand j'ai découvert le taaaant attendu Zombicide. A moitié entre : « Ils commencent à nous gaver avec toutes leurs dépouilles mal fringuées » -d'autant que Zombicide a excessivement bien su faire parler de lui avant de sortir- et : « Hmm faascinant ce phénomène sociétal n'est-ce pas ? ». Mais quand on vit avec un fan d'améristrash, de toute façon, on n'a pas le temps de réfléchir. J'allais passer à la Guillotine Games tôt ou tard. Et honnêtement, ça ne me fâchait pas, même si pour tout dire, moi je guettais surtout le City of Horror.
Oui mais là, y a des zombies chéri !
Alors, là voici la grosse, l'énorme, l'obèse boite de Zombicide (mais sur quelle étagère va-t-on caler ce monstre ? ha c'est malin !). Il paraitrait qu'on a rarement vu boite si pleine chez Edge. Oui, bon, si j'étais mauvaise langue je dirais qu'après avoir sorti les figurines de leur cale en plastique, on a rarement vu boite si vide. Mais non, je ne suis pas mauvaise langue. Car c'est quand même sacrément bien rissolé comme matoss. Les figurines justement. Haa bhaa voilà du zombi bien moche ! De la secrétaire de direction au joggeur du samedi : on a là toute une tranche de la population passée au scalpel. Et le spectacle est assez divertissant.
Zom me fait le topo sur les règles. D'une simplicité quasi enfantine tout ça ! J'en suis perplexe.
« Mais chéri… Est-ce que ça va pas faire doublon avec Gears of war ?
– Non. Ça n'a rien à voir. Dans Gears of War, y a pas de zombi. »
Ha bha, L'argument.
……Zombiiii… zombiiii …
…
Bref, c'est d'une oreille presque suspicieuse que j'écoute le scénario 7 qui nous met face à la pire menace qui soit. Mieux que le zombi, le zombi radioactif ! Une sombre histoire de centrale nucléaire qui s'est écroulée (mais où vont-ils chercher tout ça ?? je vous le demande)… Allez, même pas peur. J'ai déjà buté des hordes de Locustes quand j'étais soldat dans Gears of war, c'est pas des pauv' loques sorties de la tombe qui vont me faire frémir.
j' veux mon ptit déjeuner !!
Coopératif oui, mais entendons-nous bien…
Alors je pose le cadre :
« Chéri, je sais que c'est du coopératif…Et je sais que t'es au taquet sur les règles. Alors s'il te plait, gaffe. Si tu commences à me dire tout le temps ce que je dois faire, ça voudra pas le faire hein.». Bin oui, il s'agit de bosser en équipe. Ce que j'entends bien faire. A condition qu'il s'agisse bien d'une équipe… sans meneur. Shanouillette : ni Dieux, ni Maître.
Ce paramètre réglé, on fait rapidement connaissance avec ‘Wanda' la serveuse en roller, ‘Doug' le gratte-papier ambidextre, ‘Amy' la Goth en colère, ‘Josh' le mec à capuche insaisissable, ‘Ned' le vieux geek paranoïaque et ‘Phil' le flic qui a la chance de se battre avec autre chose qu'une poêle. Six persos hyper charismatiques sortis tout droit de films d'actions et de morceaux de gloire de la culture pulp. Le jeu dans le jeu c'est de retrouver qui est qui. Et y a déjà des nouveaux protagonistes de prévus. Allez, ci-dessous je vous en fais un facile : voici ‘Chaz'
Chuck sait que vous lisez cette phrase !
Bon, les premiers tours, c'est clair que je m'en remettais malgré moi aux conseils (très avisés, avouons-le) de mon Zom. Faut préciser qu'il avait déjà une partie dans les jambes lui. Il connaissait bien les persos et leur style de jeu. Mais, rassurez-vous, je me suis vite mise à penser par moi-même, telle une zombie qui aurait trouvé un cerveau. Quant à Zom, dans toute sa sagesse, il comprit vite qu'il devait me laisser apprendre de mes erreurs.
Heureusement, il est une chose qu'on ne pourra jamais défaire : si je commets parfois des bévues tactiques, j'ai toujours de la veine aux dés. Ça sauve les meubles et les sacs de riz.
« Je vais jeter Josh dans la foule de gros tas me nettoyer tout ça à la machette et ressortir aussi sec ! Insaisissable qu'il est, le type.»
« Et si j'envoyais ma blondinette faire le tour du bâtiment pour faire du bruit et attirer les zomb de l'autre côté ? »
« Trop de la boulette chéri ! Doug a trouvé deux uzis sous le lit ! J'adoore cet hôpital. »
« Bonne nouvelle. Ned le taré a maintenant tout ce qu'il faut pour nous préparer un cocktail molotov des familles. On-est-bons-on-est-bons-on-est-bons. »
« Ooh… Galère, j'ai défoncé la porte et ils sont 26 à moisir derrière. C'était quoi le plan déjà ? » Oui, bon, des fois, je lui redemandais un peu des conseils, parce que quand ton Zom porte des T-shirts « I won't fix your PC » c'est qu'il est fichtrement doué en dégommage de morts qui marchent.
– 26 derrière la porte…ça commence à sentir le froissé là…
– Et… Ils savent pas ouvrir les portes hein ?
– Bha… En fait, c'est pas dit dans les règles…
– On va dire que non.
– Ouais, ils sont trop miteux pour trouver une poignée de toute façon.
– Tu m'étonnes John. »
C'est dans ces moments-là qu'il y a des petits exploits dignes d'un Evil Dead 8. Wanda utilise son pied-de-biche pour ouvrir la porte pendant que Doug se poste devant l'encadrure et dirige ses guns sur la masse dégoulinante de bigorneaux pour envoyer sa rafale d'obus. Le hic c'est que nos héros sont pas fichus de viser convenablement avec leurs armes à feu. Autrement dit, si un compère se trouve lui aussi dans le coin, il a intérêt à numéroter ses abattis.
Tout est question de timing et de placement. Mais comme chaque perso a son style, ils se complètent bien et y a moyen de faire des jolis coups d'éclats. D'autant qu'ils peuvent tous développer des nouvelles compétences. L'expérience est directement indexée sur le taux de morts-vivants refroidis. Plus on en calme, plus on devient un gros ‘zombi slayer'. Par contre, on n'a toujours que deux maigrichons points de vie. Et ça, c'est raide. Il ne va pas être rare de voir tomber un ami sur le trottoir.
Alors, Zombicide ? ça tue ?
Je tiendrais pas plus longtemps avant de vous le dire tout net : c'est carrément jouissif ce jeu ! L'ambiance film d'action, pari réussi. Même si vous n'avez jamais vu « La Nuit des Morts-vivants », ni « Moi, zombie : chronique de la douleur », ni même « Scooby-Doo sur l'île aux zombies ! », en jouant à Zombicide, on ne peut que visualiser les actions comme autant de scènes de série Z. Du jeu de plateau immersif comme je les aime.
Ils ont vraiment pensé l'ensemble des scénarii (ce qu'on appelle une « campagne ») comme un enchainement de séquences cinématographiques. Et encore, on n'a pas joué les scénar' où on peut conduire des voiture de flics et aplatir tout ce qui peut passer entre nos roues et le bitume ! Héhéhé.
En quelques mots, efficace, fluide, nerveux, drôle et prenant.
Moins long que Gears of War.
Et puis là… bin c'est vrai… Y a des zombis !!!
04/12/2012
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