Illustré par Adrian Smith
Edité par Cool Mini Or Not
Langue et traductions : Anglais
Date de sortie : 2020-00-00
De 2 à 5 joueurs
A partir de 14 ans
Durée moyenne d'une partie : 80 minutes
Thèmes : Antiquité, Egypte, Mythes et croyances
Mécanismes : Affrontement, Arbres/pistes de technologies, Enchères, Figurines, Majorité, Pari
Types de jeu : Jeu de plateau
Complexité du jeu : Amateur, Expert
Ankh fait suite à Blood Rage et Rising Sun, fermant la « trilogie mythologique », comme l’appelle son auteur, Eric Lang. Dans Ankh, on est un dieu souhaitant survivre à l’arrivée du monothéisme.
Contrôlez donc les zones d’Egypte avec vos troupes !
J'ai beaucoup fait découvrir Ankh, au final, et j'y ai joué dans plusieurs de mes groupes de joueurs. C'est clairement un jeu expert, malgré un corps de règles relativement simple.
Pour ceux qui se demanderaient : ça marche aussi bien à deux qu'à plus.
ACCESSIBILITE DES REGLES 15,5
Les règles d'Ankh sont plutôt du côté très clair, mais certaines formulations françaises posent un tantinet question. Je me suis également posé certaines questions à cause de quelques interactions de pouvoirs assez fines. Pas dramatique, mais suffisamment récurrent pour devoir faire un aller-retour dans les règles de temps à autres (99% du temps fructueux). On sent une certaine maîtrise et un certain affinage dans l'élaboration de ces règles.
QUALITE DU MATERIEL 15,5
Disons-le clairement : Ankh est un jeu qui a une présence de table de dingo, surtout avec les monuments en 3D (privilège de l'édition Kickstarter). Entre les illustrations toutes hiératiques d'Adrian Smith, le travail minutieux de Nicolas Fructus sur la carte d'Egypte et les figurines assez incroyables, on a un décor qui en jette véritablement.
En revanche, certaines couleurs sont un peu proches (les verts d'Osiris et Sobek, sur les composants carton), et la lisibilité se retrouve parfois heurtée par toute cette 3D (les jetons Contrôle un peu cachés par l'obélisque ou la pyramide...). Mais, en soi, cela est véritablement le seul point noir ergonomique du jeu : le reste est très étudié !
On pourra se plaindre de la place que cela prend sur la table, mais cela reste raisonnable pour un jeu kickstarté. En revanche, l'économie d'espace et le nombre de figurines présent (quoi que contenu, car au final 7 par joueur, plus les gardiens) dans la boîte en fait une micro corvée de rangement et d'installation. Encore une fois, pas de grosse surprise pour un jeu venant du financement participatif.
THEME 15
Le thème du syncrétisme divin est plutôt raccord avec l'Egypte ! (Amon-Rê, quelqu'un ?) Effectivement, les divinités mineures sont souvent assimilées à une divinité tutélaire, voire complètement absorbées. Cependant, chaque dieu "respecte" son identité de base. Pour certains, comme Isis, des libertés sont prises pour s'accommoder avec le rôle tenu, mais pas de fausses notes.
La lutte pour le contrôle de territoire, bien que très mécanique (on cherche la majorité, le placement près des monuments), s'inscrit dans une narration globale beaucoup plus en retrait, mais également beaucoup plus poussée.
On n'est jamais dans un jeu narratif, ni dans lequel les choix sont dérivés du thème, mais ce n'est pas pour autant que le thème n'est pas là.
DUREE DE VIE 16
Du haut de mes sept parties, à date, je ne me lasse pas et ne vois pas comment je me lasserais d'Ankh. D'une part, on a envie d'essayer chacun des dieux, et il y en a cinq dans la boîte de base (sept avec l'édition KS, plus encore avec l'extension Panthéon). Ensuite, les gardiens apportent un renouvellement (plus mineur) à chaque partie. Mais, en sus, il y a des scénarios, changeant à la fois la mise en place et les règles, avec un petit ajustement, un petit encouragement à changer de façon de jouer. Cette vision très modulaire du gameplay génère en permanence des situations inédites auxquelles il faut s'adapter !
MECANISMES 14
Mécaniquement, nous avons affaire à un petit bijou ! Chaque joueur ne disposant que d'une à deux actions parmi quatre, on a des tours relativement rapides (sauf les déplacements, qui permettent de reconfigurer ses troupes sur la carte). La prise de décisions est néanmoins cornélienne car à chaque action effectuée, une piste avance. Si vous arrivez en bout de piste, vous déclenchez un événement, presque toujours alléchant, mais arrêtant votre tour. Ainsi, vous devez calculer le résultat des actions effectuées, mais aussi le potentiel d'action laissé à vos adversaires ! Un peu de gêne, non bloquante, c'est toujours bien :-)
Lorsqu'arrivent les combats, les joueurs présents dans les mêmes régions jouent une carte parmi une main de sept. Ces sept cartes sont expertement conçues, et toutes aussi puissantes les unes que les autres ; il faudra savoir ce qui intéresse l'adversaire, pour deviner ses possibilités de jeu... et jouer en conséquence ! Comme pour les deux grands frères d'Ankh, il faudra savoir perdre certains combats pour remporter des avantages stratégiques.
Enfin, on pourra fragmenter des zones pour maximiser son scoring. Difficile de savoir comment faire au début, mais cet outil se révèle très utile une fois les bases du jeu acquises : le changement d'environnement permet de marquer plus, mais aussi de restreindre/contraindre l'espace.
Résulte de tout cela un jeu nerveux, intense, dont il n'est pas aisé de maîtriser l'entière matrice. Vos premières parties seront donc intenses, et difficilement maîtrisables. Mais c'est aussi là la beauté du jeu, qui propose une courbe d'apprentissage très nette.
N'oublions pas l'un des mécanismes les plus importants, la fusion. À partir de trois joueurs, à mi partie, les deux joueurs les plus à la traîne fusionnent. Ils peuvent désormais se coordonner autour de la table, les pouvoirs de leurs dieux fusionnés. Mais il va falloir regrimper au score ! Dans mon groupe, nous estimons la fusion extrêmement puissante, au point que parfois, si les traînards ne sont pas trop, justement, à la traîne, il vaut peut-être mieux viser la fusion que la deuxième place (la première restant toujours souhaitable, bien entendu). Ce mécanisme de rattrapage inédit me semble créer de l'émotion, positive comme plus négative (certaines tablées s'y refusent !) mais, pour ma part, je le trouve très audacieux et j'aimerais que plus de jeux aient ce nerf.
Si l'on devait reprocher quelque chose, je dirais bien le plateau personnel des joueurs : je le trouve certes malin, mais un peu scripté et forcé. On voit clairement des pouvoirs peu intéressants au début, et beaucoup plus rémunérateurs par la suite, avec des parcours tout tracés en fonction de la divinité jouée et du scénario ; par exemple, Sobek n'a jamais intérêt à prendre autre chose que des boosts de force, puisqu'il participe à plusieurs combats à la fois. Mais c'est le prix de l'épure et de la simplicité du jeu !
Ankh est donc tout simplement une réussite ; une réussite d'auteur, avec un propos amené en son bout et des trouvailles audacieuses, une réussite ludique proposant des choix difficiles et souvent récompensés, mais aussi une réussite éditoriale, si l'on omet quelques soucis de lisibilité. Si Blood Rage est bien entendu plus abordable, Ankh récompense largement mieux ses joueurs, principalement grâce à une courbe d'apprentissage plus pentue ! La pureté de ses mécanismes et son corpus de règles tout léger le rend facile à apprendre mais qu'on ne s'y trompe pas : Ankh suscite des raisonnements tortueux.
Si vous appréciez le contrôle de territoire, vous trouverez en Ankh une expérience complexe et subtile, avec un peu de bluff, avec de la gestion, et, surtout, la pression invisible du monothéisme qui guette.
- Présence de table incroyable
- Des mécanismes simples mais profonds
- Audacieux et innovant !
- Lisibilité parfois hasardeuse
LUDOVOX est un site indépendant !
Vous pouvez nous soutenir en faisant un don sur :
Et également en cliquant sur le lien de nos partenaires pour faire vos achats :