Run run run! Indiana Jones au pays des Aristochats
Le nouveau jeu coopératif familial de Bruno Cathala et Anthony Perone édité par The Flying Games sortira ce mois-ci. Dans Run run run !, vous jouez une équipe de Chaventuriers explorant le tombeau de Toutancanin (il fallait la trouver) ! Vous venez de découvrir la salle du trésor et soudainement la porte par laquelle vous êtes entrés a été bloquée. Des momies grognent au loin et votre objectif sera de rejoindre une autre sortie avant qu’elles ne vous transforment en pâtée pour chien. Seulement voilà, la sortie est bloquée et il faudra d’abord trouver comment la déverrouiller…
La victoire sera votre à deux conditions : vaincre le boss Momie et déverrouiller la porte de sortie. L’équipe perdra la partie si une momie parvient à rejoindre la salle du trésor ou si un des chaventuriers perd toutes ses cartes en main, le plus souvent en se faisant croquer (comprenez « en subissant des dégâts »).
Comment cha marche ?
Le principe du jeu est à base de pose de tuiles (ou plutôt de cartes hexagonales). On jouera chacun son tour en faisant jouer le camp ennemi (c’est-à-dire en jetant les dés Momies) avant de jouer une des actions au choix :
- Poser une carte Lieu, qui dévoilera la suite du labyrinthe
- Combattre une momie : plus on sacrifiera de cartes Lieu, plus on jettera de dés
- Coopérer, jusqu’à 3 fois par partie, pour échanger et piocher des cartes
À chaque tour, lancer les dés momies vous exposera au risque d’en réveiller une : chaque fois qu’une face Momie est obtenue, on déplacera les momies présentes d’une case et on remplira une jauge de cœurs. Cinq cœurs obtenus feront réveiller une des 4 momies au hasard.
Ces momies vous harcèleront sans cesse en se dirigeant vers la salle des trésors (votre case de départ). Si vous les laissez la rejoindre, tout est perdu ! Bien entendu vous pourrez vous bagarrer contre ces momies en dédiant votre tour à cela : vous vous déplacerez sur leur case et jetterez des dés de combat.
Mais le cœur du gameplay tient dans l’assemblage des cartes hexagonales. En effet, pour gagner on cherchera à obtenir 2 types de motifs triangulaires : 3 hexagones du même symbole, ou 3 hexagones de symboles différents. Les premiers vous permettront de débloquer un des 3 verrous de la sortie, les seconds vous donneront des torches. Les torches servent à éclairer des salles qui n’en ont pas, et seront pénalisantes si vous n’en possédez plus. Donc vous devrez alterner la réalisation de ces motifs pour à la fois déverrouiller la porte et vous munir d’éclairage.
Visuellement, le jeu est plaisant. Le thème mélangeant « Indiana Jones » et « chiens & chats » est accrocheur, tout comme les illustrations de qualité, cartoonesques et mignonnes comme tout, signées Camille Chaussy (Via Magica, Micropolis…).
Chamusant ou bien ?
Ma première rencontre avec le jeu s’est faite sur une butée. Les règles sont ambigües sur certains points, laissant parfois dans le doute. La première partie a donc été dédiée à débuguer tous ces points de doutes. C’est une sensation un peu pénible pour moi, car elle me sort de l’immersion le temps de trouver la réponse nécessaire à la poursuite de la partie. Un exemple de tour de jeu complet abordant les quelques cas exceptionnels aurait été bienvenu, car on a tendance à bloquer si on découvre le jeu par soi-même.
J’ai trouvé les réponses par déduction après avoir parcouru le livret plusieurs fois, ou bien en vérifiant sur la version anglaise, car certaines phrases manquent à l’appel sur la version française. Pour ne pas les détailler ici, j’ai ajouté un petit fichier en fin d’article pour guider d’éventuels chaventuriers perdus et aussi éventuellement pour proposer des suggestions de retouches.
Côté sensations de jeu, je reste mitigé. Le jeu est plaisant sur certains aspects. La pose d’hexagones pour constituer un labyrinthe, bien que classique, m’a toujours attiré. Et à l’issue de la partie, je n’ai pas eu l’impression d’avoir passé un mauvais moment.
Cependant certains aspects me laissent perplexe. Premièrement, le rythme m’a semblé assez monotone et je n’ai pas ressenti de réelle montée en puissance, ou de jalons franchis. Les lancers de dés Momie et la pose de cartes s’alternent sans grands rebondissements. L’accumulation de cœurs engendrée par les dés Momie font que l’arrivée de ces dernières intervient à intervalles assez réguliers. Une fois une momie vaincue, elle retourne dans son paquet, formant donc une réserve infinie. J’ai eu ainsi l’impression de sans cesse les renvoyer dans leur pioche puis de les piocher de nouveau, tant que l’objectif final n’était pas atteint. Sur certaines, parties, les momies peuvent s’accumuler, et on sentira clairement la tension, mais ce sera un peu au détriment du gameplay, car il faudra camper sur ces dernières pour s’en débarrasser.
De même, la pioche de cartes Lieu ou de jetons Sarcophage n’apporte pas tant son lot de surprises, les effets étant assez classiques (piocher des cartes, annuler un dégât, etc.), tout comme les différentes situations de jeu qui tendent à se ressembler et se répéter au final. Cela m’a semblé manquer de « Game changer » (un événement qui va changer le cours des choses) ou peut être de piment parfois.
Ce qui m’a plus gêné est l’occurrence régulière de « choix peu satisfaisants ». Non pas qu’il n’y ait pas de solution dans nos mains de cartes, car il y en a toujours, mais on reste régulièrement devant des possibilités relativement peu enthousiasmantes, ou au contraire évidentes. Par exemple, on sait que le jeu va nous pousser à réaliser au plus vite des triangles avec nos cartes pour déverrouiller la sortie. Ce patron n’étant pas facile à réaliser, on aura tendance à poser la carte de notre main qui permettra le plus de s’en rapprocher, sans trop envisager une alternative, qui ne ferait que nous retarder, réduisant quelque peu la gamme de possibilités intéressantes à mon sens.
De même, en présence d’une momie et surtout du boss, on n’aura d’autre choix que d’aller se frotter à eux, autrement la partie sera rapidement perdue, car ils vont foncer vers la salle du trésor. Ou encore, lorsque l’on est amené à perdre des cartes en subissant des dégâts, cette perte se fera au hasard, laissant l’aléa décider de notre sort. Je n’ai rien contre le hasard mais l’absence ou la raréfaction des choix là où il devrait peut-être y en avoir pour permettre un jeu malin me dérange un peu plus. Sans doute y aurait-il eu un moyen de donner aux joueurs plus d’occasions d’exprimer leur ruse avec ces mécaniques-là ? à méditer !
En résumé
J’étais très enthousiaste à l’idée de découvrir ce jeu de pose de tuiles coopératif, avec de chouettes illustrations et un thème accrocheur. Peut-être ai-je placé trop d’espoir dessus, mais cela n’a pas été un coup de cœur pour ma part. Le gameplay ne m’a pas paru tant varié et je suis resté parfois pantois devant ma main de cartes, soit parce que les choix ne m’ont pas paru « sexy », soit parce qu’ils m’ont paru trop réduits. Je n’ai cependant pas passé un mauvais moment, sauf lorsque j’ai été confus par la lecture des règles. Concernant la configuration, j’ai eu un ressenti un peu meilleur sur les rares parties que j’ai faites à 4 joueurs, même si mon ressenti global est resté le même. Des joueurs en quête de légèreté et accrochés par le thème pourront peut-être adhérer, s’ils ne sont pas trop exigeants sur la capacité du jeu à créer des situations de combo ou d’enchainements.
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Meeple_Cam 11/03/2022
analyse pleinement partagée. J’ai aussi été très gêné par la possibilité de fin très abrupte. Tout semble avancer pour le mieux, et puis l’alea fait que 2 momies se génèrent rapidement et se retrouvent vite sur la salle au trésor. « Quoi ? on a déjà perdu? Mais on était bien parti ! ». Bref, je retourne sur Sub terra