Par Odin / Les Pierres de Coba : les casse-têtes de l’été
Oldchap Games font de plus en plus parler d’eux. Cette maison d’édition spécialisée dans les petits jeux d’ambiance (Gobbit, Panic Island) a marqué la sphère ludique avec sa nomination aux As d’Or de Cannes 2020 pour Fiesta de Los Muertos. Depuis 2018, les Oldchap Games élargissent leur champ d’action aux casse-têtes, toujours au format miniature, avec Par Odin! en 2018, puis avec sa suite Les Pierres de Coba, tout juste sortie dans les boutiques.
Petits et rentrant dans n’importe quelle valise, c’est donc le bon moment pour jeter un œil sur ces deux jeux en solitaire, du même auteur Antonin Boccara (Fiesta De Los Muertos, Panic Island…) et du même illustrateur Michel Verdu. Des neurones, des dés et de la mythologie sont au programme !
PAR ODIN
Vous venez de mourir et atteignez les portes du Valhalla. Désireux de pouvoir mériter votre place en compagnie des dieux pour jouer avec eux, il faudra d’abord les satisfaire en réussissant 50 défis de difficulté croissante. Dans chacun de ces défis, vous devrez constituez deux armées de force égale afin de créer des batailles équilibrées pour distraire les dieux pour les siècles à venir. Voilà le pitch !
Le principe est simple : vous disposez de 7 dés blancs (auxquels s’ajouteront 1 puis 2 dés noirs pour les niveaux plus élevés) et devez les orienter sur les faces indiquées par la mise en place.
Alors oui, premier fait qui peut surprendre : cela peut démanger, mais on ne lance pas les dés ! Chaque face aura une valeur de force (4 faces ont une valeur fixe, les 2 autres dépendent des autres dés). L’objectif de chaque défi sera de séparer vos dés en deux lots de force égale. Ni plus ni moins.
- Le soldat vaut 1
- Le Capitaine 2
- Le Héros 3
- Le Voleur vaut -1
- L’Assassin vaut 1 mais annule un Héros
- Le Magicien vaut autant que le nombre de dés blancs non magiciens de l’armée.
Ce concept de résolution de casse-tête avec des dés est tout à fait original et ne semble pas avoir son équivalent dans le monde ludique. N’hésitez pas à me corriger dans les commentaires si j’oublie un ancêtre lointain !
Lorsque l’objectif est atteint, on passe au défi suivant. Un petit texte de fluff nous introduit une nouvelle légende. En parcourant les défis, vous vous familiariserez un peu plus avec les divinités du panthéon scandinave et quelques créatures mythologiques, ces dernières étant représentées sur deux mystérieux dés noirs.
Les dés noirs justement, viennent corser la difficulté.
En les intégrant à partir du niveau 16, ils auront un effet supplémentaire agissant sur une armée ou sur les deux. Par exemple, le serpent agit sur le dé le plus fort de l’armée et inverse sa force (3 devient -3). Une couche supplémentaire à intégrer dans votre calcul mental !
Petit mais costaud !
Dans la plupart des casse-têtes modernes, on va devoir placer ou déplacer des objets ou associer des formes ou couleurs entre elles. Le plaisir de la réussite sera associé à une action mécanique : « youpi j’ai casé toutes mes pièces dans la boite ! ». On ne peut que citer la gamme réussie et très riche des Smart Games qui fait de nombreux adeptes chez les petits et les grands.
Par Odin! emprunte la même approche que les jeux de cette gamme : un livret décrivant plusieurs dizaines de défis associé à un lot de pièces à assembler. Seulement ici, la différence est notable : la réussite est liée à l’obtention d’un nombre correct. Autrement dit, le résultat n’est pas visuel, mais cérébral, lorsque vous réaliserez que les forces des deux armées sont égales. On reste posé devant une ligne de dés, à cogiter sur l’égalité des scores. La mécanique est assez sobre et n’ira pas titiller les papilles des plus friands de manipulation de matériel. Cela dit, pour avoir testé les Smart Games, j’ai pour ma part pris autant de plaisir à jouer avec Par Odin!.
Côté mise en place et prix, c’est minimaliste. Vous aurez juste besoin d’une petite surface plane (disons 12 x 5 cm) pour disposer les dés et on installe le tout en 10 secondes. C’est donc un format idéal pour emporter en vacances ou ailleurs dès lors que vous trouverez un coin de table.
« Par Odin, mais c’est des maths ? »
Cette idée reçue est pour moi partiellement fausse, sauf si l’on considère que faire un peu de calcul mental, c’est des maths. Il n’y a pas d’opération complexe, simplement des additions et soustractions de points affichés sur les dés. Et surtout, résoudre un défi ne nécessitera pas un sens accru de la logique. Il est possible de composer et d’avancer avec un peu de jugeote et d’intuition.
C’est d’ailleurs ce que je fais : je teste une recette, j’ajuste, je refais, sans réelle anticipation et sans faire chauffer mon processeur à 90°C (sauf sur les derniers niveaux, j’y reviendrai). Je me demande s’il est même possible au-delà des 15 premiers niveaux de deviner une réponse à la simple lecture du défi. Pour trouver la solution, je ne vois pas d’autre choix que d’y aller à tâtons. Donc soyez rassuré, sur ce plan, Par Odin! est ouvert à tous, matheux ou pas !
Une courbe de difficulté en escalier
La difficulté fonctionne par pallier, avec des niveaux relativement homogènes sur chaque pallier. Les 15 premiers niveaux, animés par Brokk et le dieu Loki, sont faciles pour un adulte. On arrive ensuite chez la déesse Frigg et ses dix défis suivants plus corsés. Mais tant que l’on joue avec 7 ou 8 dés (les 30 premiers niveaux), le nombre de possibilités reste raisonnable et l’on finit par trouver la solution à force d’essayer des combinaisons, même si l’on sèche.
À partir du défi 25 environ, cela commence à piquer. C’est ici qu’un enfant peut possiblement atteindre ses limites suivant sa capacité à se concentrer et sa patience. Accompagné(e) d’un adulte, il ou elle pourra affronter les niveaux supérieurs avec moins de frustration (mais sans garantie que l’adulte ne soit plus doué !).
À partir du niveau 34, on arrive chez Thor. Avec 2 dés noirs, c’est la gifle ! Le nombre de combinaisons possibles explose et la difficulté franchit un cap. On entre sans transition dans la zone « hardcore », déconseillée aux enfants et aux âmes sensibles. Cela dit si vous êtes prêt(e)s à vous acharner, ou si dans vos rangs vous comptez quelques culottes courtes téméraires et balèzes en calcul mental, les 15 derniers niveaux peuvent être tentés. Pour ma part je galère 20 minutes par niveau, je perds quelques cheveux et parfois je sèche. Mais l’envie de percer le défi revient toujours et je compte bien mettre la pâtée aux dieux d’ici la fin de l’été (mais ça, c’est la théorie).
L’hydromel se boit à deux
Une fois les 50 défis relevés (bon courage !), il est possible de jouer la part ultime. Le jeu ayant nécessité le développement d’un logiciel de résolution logique des défis, ce dernier peut par conséquent résoudre n’importe quel défi proposé. Jetez les dés et prenez-vous la tête dessus, il y aura toujours une ou plusieurs solutions. Ce mode de jeu infini est bienvenu mais la difficulté variera énormément. À réservé aux cascadeurs donc (le lien est donné en fin d’article).
Il est d’ailleurs possible de jouer à ce mode à deux, quelques règles sont fournies. Il s’agit globalement d’une course à la solution. C’est toujours sympathique, mais soyons d’accord : n’achetez pas ce jeu pour y jouer exclusivement à deux !
On se donne rendez-vous en fin d’article pour un bilan général !
LES PIERRES DE COBA
Comme je le disais en intro, l’équipe Oldchap Games a remis le couvert fin juillet avec un nouveau stand alone haut en couleurs. Pas besoin donc de posséder le premier opus pour y jouer. Ce Pierres de Coba revient sur le même principe que son grand frère, la même mécanique avec le même nombre de dés.
La thématique, un travail de pro
Ici, nous quittons le panthéon d’Asgard pour rejoindre celui de la civilisation Maya ! Vous êtes également mort, mais ne chercherez pas cette fois à distraire les dieux. Ils vous chargeront de rétablir un équilibre au sein la société Maya.
Il faut le souligner, il y a un effort de recherche sur le thème. Le principe reste le même : chaque ensemble de niveaux de difficulté équivalente est accompagné par une divinité du panthéon. De nombreux aspects et divinités de la religion Maya sont présentés avec chaque défi grâce au concours du papa de l’auteur en personne, ayant consacré sa carrière à cette étude. C’est toujours bon à prendre car cette compétence ne court pas les rues ! Il est également à souligner que le tout est joliment illustré par Michel Verdu, dans un design très coloré.
Il est indiqué sur la boite « un jeu solo, narratif et évolutif ». Bon, il faut être honnête, l’aspect narratif n’est pas ce qu’il y a de plus marquant. On aura certes toujours les petits paragraphes documentaires entre les défis, on conserve les ensembles de défis accompagnés par des divinités Mayas, mais on ne plonge pas non plus dans un univers très immersif. Le jeu reste dans le périmètre d’un casse-tête, mais la narration ne gâche rien au plaisir, au contraire.
Des rouages plus complexes
Côté mécanique, c’est une autre histoire. Les dés blancs sont cette fois-ci plus difficiles à appréhender. Nous avons toujours 3 faces de dés à valeur fixe, mais pour les 3 autres c’est plus coton.
- La Potière vaut 1
- Le Paysan 2
- Le voleur -1
- La Tablette vaut 1 ou 2 selon si le nombre de dés de l’armée est pair ou impair
- Le Shaman prend le nombre de dés de l’armée d’en face
- La cruelle Reine prend le ou les dés de score le plus bas de l’armée et les fixe à zéro
À chaque fois que vous changerez votre combinaison, la comptabilisation des points sera donc plus fastidieuse que dans Par Odin!, ce qui ralentira légèrement votre progression. J’ai pour ma part eu peine à dépasser les niveaux 15. Le calcul du résultat, auparavant simple avec Par Odin!, devient complexe même pour des niveaux relativement basiques. Cette gymnastique cérébrale risquera de devenir quelque peu bourrative pour celles et ceux qui n’aimeraient pas trop se prendre la tête.
Quelques variétés apportées dans le gameplay
En guise de petite cerise sur le gâteau : une variante est proposée pour étendre le défi pour 2 joueurs que j’ai mentionné avec Par Odin!. Cette fois-ci, on mélange les dés des deux jeux et on balance ! Je n’ai pas eu l’occasion de tester ça. Est-ce décoratif ? Tout retour sera bon à prendre dans les commentaires !
Enfin, la principale variante a été apportée avec les « Portes des Ancêtres ». Il s’agit de quatre défis présentés sous une autre forme : On place cette fois les dés sur le livret avec des consignes différentes à chaque défi. Quatre chiffres seront ainsi conservés pour débloquer la fin de l’histoire en ligne sur le site Oldchap Games. Si l’idée est bonne, on aurait peut-être aimé que cela aille un peu plus loin que sur quatre défis. Pour le prochain numéro peut-être !
CONCLUSION : À QUELS DIEUX SE VOUER ?
Par Odin! et Les Pierres de Coba sont tous deux des casse-têtes en solitaire originaux et réussis, proposés à un prix modeste. Cela dit, ils ne révolutionneront pas suffisamment le genre pour convertir les réfractaires. Ils sont tous deux basés sur une mécanique similaire faisant intervenir le calcul mental : séparer vos dés en deux lots de force égale. Ils diffèrent simplement sur les capacités des dés et sur le thème.
Si vous souhaitez découvrir la gamme mais ne savez pas par lequel commencer, suivez le guide :
- Par Odin! pose les bases classiques de la mécanique, avec des dés aux pouvoirs relativement simples. Il reste donc accessible. Les 15 derniers niveaux sont cela dit redoutables. Si vous souhaitez y aller progressivement, Par Odin! sera sans doute le meilleur choix.
- Les Pierres de Coba ne changera pas la mécanique de base. Si elle ne vous a pas convaincu, alors ce ne sera pas le cas ici non plus. Il se différencie de son grand frère en proposant des pouvoirs différents, plus riches mais plus complexes à appréhender, avec quelques variantes sur les défis. Le style est renouvelé et la difficulté est donc supérieure au premier opus. Si Par Odin! vous a séduit et que vous souhaitez poursuivre avec une expérience similaire, Les Pierres de Coba ne risque pas de vous décevoir.
- À l’inverse, si vous commencez par Les Pierres de Coba, Par Odin! risque de paraître un peu trop plat et simpliste en deuxième lieu. Je ne peux donc que vous conseiller de commencer par ce dernier.
En tout cas, j’ai apprécié mon expérience avec ces petits jeux en solitaire, même si je me suis arrêté aux trois quarts du parcours chez les Vikings, et aux deux tiers environ chez les Mayas. Je réfléchis d’ailleurs à prendre un autre billet de train pour prétexter une revanche ! 😉
► Pour aller plus loin
Le site d’Oldchap Games propose quelques contenus intéressants :
- Des défis bonus pour Par Odin!, ainsi qu’un logiciel de résolution de défis si vous jouez en laçant les dés
- Également, vous trouverez deux démos, pour découvrir les premiers niveaux de Par Odin! et des Pierres de Coba
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Groule 11/08/2020
Le billet de train est pris !
Shanouillette 12/08/2020
haha ! smart 😉
Antonin 17/08/2020
Un grand merci pour ce bel article 🙂
Groule 17/08/2020
Merci à toi !