La Guerre de l’Anneau : Le Jeu de Cartes – Choisir, c’est renoncer
Si vous vous intéressez aux wargames, aux jeux de figurines ou encore aux jeux thématiques, vous aurez probablement déjà entendu parler de La Guerre de l’Anneau, publié par Ares Editions et localisé en français par Nuts! Publishing. Classé premier dans la catégorie « wargames » de BGG et neuvième dans la catégorie « thematic », War of the Ring est un jeu complexe qui, de l’avis de beaucoup de joueurs, transcrit sur plateau la narration du Seigneur des anneaux de façon remarquable.
Mais une partie de La Guerre de l’Anneau dure trois bonnes heures et la configuration la plus adaptée, c’est le duel. Alors comment fait-on si l’on veut jouer à La Guerre de l’Anneau, qu’on est plus que deux ou qu’on n’a pas trois ou quatre heures devant soi ? Depuis quelques mois, on peut désormais jouer au jeu de cartes de LGDA. Conçu par Ian Brody (Quartermaster General), LGDA – Le jeu de cartes est un jeu d’affrontement pour deux à quatre joueurs.
Si vous jouez les Peuples Libres, alors vous traverserez les aventures de Frodon, de Gandalf et de leurs alliés depuis Cul de Sac jusqu’à la Crevasse du Destin. Si vous jouez l’Ombre, vous pourrez déchaîner sur eux les Orques, les Nazgûls, les Trolls et toute sorte d’aimables bestioles qui n’ont qu’un but : permettre à Sauron de prendre possession de l’anneau. Pour l’une comme pour l’autre faction, l’objectif sera d’accumuler le plus de points à la fin de la neuvième manche.
Pour vous faire une idée plus précise des règles du jeu, je vous propose de regarder notre Ludochrono.
Pourquoi faire compliqué, quand on peut faire simple ?
Grâce à la relative simplicité de ses règles, LGDA : Le Jeu de Cartes est à mon sens accessible aux initiés sans difficulté majeure : à son tour, chaque joueur joue une carte et en défausse une. Il est également possible d’utiliser le jeton Anneau pour piocher des cartes supplémentaires, ou encore d’éliminer deux cartes pour en piocher une nouvelle et, enfin, de passer son tour sous certaines conditions.
Une manche prend fin lorsque tous les joueurs passent. On résout alors les combats sur les Routes et les Champs de Bataille. C’est grâce aux combats que les deux factions, l’Ombre et les Peuples Libres gagnent des points. On pioche alors le nombre de cartes indiqué pour chaque faction et la manche suivante peut alors commencer. À part quelques points de règle un peu plus précis et quelques cas particuliers, vous avez là l’essentiel des règles de La Guerre de l’Anneau : Le Jeu de Cartes.
Si les règles sont peu compliquées, les cartes et leurs effets ajoutent en revanche une bonne couche de complexité et de profondeur stratégique. Outre à indiquer leurs points d’attaque et de défense sur le côté gauche, le texte de chaque carte indique souvent un effet spécifique qui, en fonction du contexte et de l’avancement de la partie, vous sera plus ou moins utile.
C’est particulièrement le cas pour le deck des Peuples Libres : d’un côté, ils piocheront moins de cartes à la fin de chaque tour, mais, de l’autre côté, les effets de ces cartes seront plus puissants. En ce sens, les Peuples Libres me semblent exiger une meilleure connaissance des cartes du jeu, là où l’Ombre dispose d’un plus grand nombre de cartes qu’on pourra jouer facilement dans les champs de bataille.
Défausser des cartes : l’expérience de l’arrachement
Pour simple et classique qu’elle soit, la contrainte consistant à devoir défausser une carte chaque fois qu’on en joue une, est ingénieuse et va nous confronter à des choix difficiles. A moins de bénéficier des effets de certaines cartes, chaque joueur ne pourra réaliser que deux ou trois actions par manche. S’il lui reste une seule carte en main, il pourra la jouer mais il devra, en contrepartie, retirer du jeu une carte de la réserve ou de sa pioche (sans la consulter au préalable, sinon ce n’est pas drôle !).
J’ai remarqué que le camp de l’Ombre – et en particulier la faction du Mordor – est moins soumis à ce genre de dilemme, dans la mesure où les effets des cartes se ressemblent un peu plus. Le joueur du Mordor ne jouant que cette faction, il pourra décider plus aisément quelles sont les cartes les plus utiles dans sa main. Pour les Peuples Libres, l’affaire est tout autre car les effets de leurs cartes peuvent être bien plus puissants.
Par exemple, il est clair que jouer Les Gardes de la Citadelle – ou, encore mieux, la Grande Porte – à Minas Tirith est un choix plus que pertinent. Cependant, si pour jouer cette carte, il faut que je défausse Aragorn, il va falloir que j’y réfléchisse un peu plus. Surtout si, avec lui, je pourrais jouer Les Hommes Morts de Dunharrow. Évidemment, dans la mesure où la pioche est toujours mélangée et qu’il est rare de pouvoir sélectionner une carte, le hasard joue une part importante dans la composition de votre main.
Néanmoins, si votre main est particulièrement mauvaise ou si vous avez besoin de jouer une ou deux cartes de plus pour contrer l’offensive du camp adverse, vous pouvez toujours jouer l’Anneau et piocher une ou deux cartes, en fonction du scénario. Notez que, dans le scénario de la Trilogie (à quatre joueurs), vous ne pouvez défausser un Anneau que deux fois par partie et chaque fois cela vous coûte un point de victoire.
Des routes peu sûres
Les combats de La Guerre de l’Anneau – le jeu de cartes ne se déroulent pas seulement sur les champs de bataille. Comme dans la saga, le chemin de la Compagnie est semé d’embûches et, surtout, d’embuscades ! Il est vrai que, tendanciellement, les routes seront favorables aux Peuples Libres, surtout au début de la partie. Les combats sur une Route se déroulent semblablement aux Champs de Bataille, à ceci près que nous compterons plutôt les jetons de Corruption et les boucliers.
Les Peuples Libres auront tout intérêt à protéger les routes car elles leur permettent à la fois de marquer des points et d’empêcher l’Ombre d’en gagner. Si les Peuples Libres remportent une route, ils gagnent les points indiqués en haut à gauche. En cas de victoire de l’Ombre, elle gagnera autant de points qu’il reste de jetons Corruption après la bataille.
Remarquons que, comme pour les champs de bataille, les combats sur les routes peuvent être résolus avant la fin de la manche si une carte permet de remplacer une route par une autre. Ce genre d’effets peut être profitable pour les Peuples Libres soit pour remporter une route sur laquelle l’Ombre pourrait contre-attaquer, soit pour limiter le placement de jetons de Corruption et espérer piocher une route plus favorable. En revanche, les routes ne peuvent pas être réactivées.
Enfin, les combats sur les routes ajoutent un élément de décision supplémentaire dans la gestion de notre main et de notre deck de cartes. On ne peut jouer une carte sur une route que si celle-ci correspond au chiffre indiqué à côté de l’anneau. Ainsi, si l’on n’a aucun mal à défausser des cartes que nous ne pouvons pas jouer sur la route en cours de résolution, il en va autrement quand nous devons retirer une carte de notre deck : abandonner une carte qui pourrait nous servir dans les manches suivantes pourraient nous coûter cher. D’un point de vue stratégique, LGDA – le jeu de cartes nous oblige ainsi à gérer notre main aussi bien sur le court que sur le long terme.
Fantastiques tiraillements
Je n’ai pas eu l’occasion de jouer à La Guerre de l’Anneau jusqu’à présent – mais promis, je m’y mets bientôt ! – en tout cas, il me semble que La Guerre de l’Anneau – le jeu de cartes réussit à combiner habilement deck-building, gestion de main et affrontement, sans que les règles soient trop complexes. Le format de la boîte est standard mais le matériel pourrait aisément être transporté dans une petite boîte voire dans une valise (il n’y a que des cartes et des pions en carton).
En termes de difficulté, le dernier opus de Ian Brody me semble cibler le public initié, amateur de réflexion stratégique, de dilemmes et d’affrontement. Si les wargames vous repoussent, n’ayez crainte : il ne s’agit pas d’un wargame à proprement parler, je le classerais plutôt dans les jeux pilotés par les cartes dans la mesure où les batailles sont résolues de façon assez abstraite, par simple comparaison des cartes jouées.
L’ergonomie est bonne, bien que les cartes donnent pas mal de lecture aux novices qui découvrent le jeu. Les illustrations sont magnifiques – je trouve qu’on les apprécie bien plus dans la version physique qu’en photo – et on retrouve, parmi de nombreux illustrateurs, la patte de John Howe qui avait déjà illustré La Guerre de l’Anneau. Pour la traduction, c’est un sans faute comme toujours chez Nuts.
Les sensations de jeu changent suivant qu’on y joue en équipe ou à deux. En équipe, j’apprécie beaucoup l’aspect collaboratif et la réflexion stratégique supplémentaire sur les cartes à disposition de notre co-équipier. En duel, on est le seul pilote à bord : on a donc plus d’informations à assimiler, mais elles permettent d’élaborer une stratégie avec moins d’incertitude.
Le scénario de la trilogie est parfait si vous avez deux à trois heures devant vous. Deux scénarios plus courts pour deux joueurs, Les Deux Tours et Le Retour du Roi, sont disponibles en anglais sur BGG et ils durent une heure environ (trois tours de jeu) tout en augmentant encore plus la tension stratégique de la partie. Je déconseille en revanche le scénario d’initiation à moins que vous l’utilisiez uniquement pour découvrir les règles du jeu. Il m’a semblé réducteur et simpliste comparé à la véritable expérience de jeu de LGDA – le jeu de cartes.
Bref, mécaniques assez familières, règles abordables, de belles illustrations et surtout des parties tendues d’un point de vue stratégique : pour ma part, je suis conquis par La Guerre de l’Anneau – le jeu de cartes et je n’hésite pas à y jouer ou à le proposer chaque fois que j’en ai l’occasion.
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Chips 04/11/2023
Merci pour cette présentation, ça donne envie ! Le sacrifice d’une carte à chaque tour semble particulièrement piquant…
El Duderiño 04/11/2023
Heureux que mon article t’ait plu ! Effectivement, on ne joue pas beaucoup de cartes à chaque manche et la nécessité de défausser une carte nous soumet régulièrement à des choix cruciaux. Sans compter les cartes qu’on est parfois bien obligé d' »abandonner », en les éliminant de notre deck !
TSR 10/11/2023
Ce jeu est un bijou, je trouve. Il sort beaucoup plus facilement que son grand frère plateau, et il offre des sensations de jeu incroyables, très bien décrites dans l’article. Bravo 🙂
El Duderiño 15/11/2023
Je suis tout à fait d’accord avec toi et merci beaucoup pour ton commentaire ! 🙂