Krosmaster Quest: le Krosmoz dans votre main
Les bouftous, les tofus,… J’avais un vague souvenir de ces mots étranges entendus pour la première fois lors de la découverte du jeu Dofus il y a une poignée d’années. Cependant, j’étais rapidement passé à autre chose et avais tourné la page de cet univers. Bien entendu, cela ne m’avait pas empêché de voir que la licence exploitée par Ankama s’était développée et avait donné naissance à une arborescence indigeste pour les noobs : séries animées, bandes dessinées, films, jeux de plateaux,… En y regardant de plus près, on frôle la saturation devant un tel placement de produits. Ceci dit, mes enfants grandissant, ces images d’un autre temps (dans mon esprit) revenaient régulièrement sur l’écran de mon téléviseur.
J’avais ainsi eu la curiosité de me renseigner sur le jeu de plateau Krosmaster Arena, issu de ce vaste univers, et les retours semblaient excellents. Malgré cela, je n’étais pas forcément intéressé par ce genre de jeux, et encore moins enthousiaste, il faut le dire, à l’idée de devoir investir dans une multitude de ces personnages colorés (si vous aussi, vous avez cédé aux sirènes du jeu Skylander à cause des yeux tous ronds de vos bambins, vous comprendrez facilement ce que je veux dire…). Du coup, lorsque l’arlésienne Krosmaster Quest (KQ pour les intimes) faisait ses premiers pas sous la forme de prototype (ce n’était pas hier), je surveillais la chose d’un œil bienveillant : et si les designers parvenaient à distiller le plaisir éprouvé dans un MMORPG (le jeu de rôle multijoueur en ligne) dans un jeu de plateau ? Une véritable promesse !
Ce ne fut visiblement pas chose facile, car la sortie de ce KQ fut de nombreuses fois repoussée. Pour le meilleur, gageons le ! Après tout, il faut prendre son temps afin de faire les choses correctement, non ? En tout cas, la bête, cette énorme boîte de jeu bourrée de matériel, avait finalement trouvé son chemin jusqu’à ma table de salon. Et c’est pour vous, sous les regards suppliants de mes deux bambins, que je vais tâcher de décortiquer ce monstre…
Bienvenue dans le Krosmoz
Ouahhhhhhh ! C’est kawaii !!!!!!!!
En effet, le matériel proposé dans la boîte de Krosmaster Quest est vraiment mignon, pour peu que l’on n’ait rien contre le style supposé débilitant des nouveaux jeux de format familiaux ! Pour ma part, je trouve le graphisme particulièrement réussi. Il faut dire que c’est ce type de dessins qui m’a donné envie de regarder le film Dofus Livre 1 : Julith (malgré tout, j’ai quand même réussi à m’endormir devant : comme quoi, le design ne fait pas tout).
J’avoue que j’ai été agréablement surpris à l’ouverture de la boîte par l’impressionnante profusion de matériel. Le jeu m’ayant été fourni « prêt à l’emploi », je n’ai pas eu à dépuncher les différentes planches, ni même à monter les différents décors en carton, exercice qui dans ce cas précis, m’eut paru relativement fastidieux. En tout cas, l’éditeur ne s’est pas montré radin car pour une cinquantaine d’euros vous pourrez découvrir des centaines de jetons, des dizaines de décors, de multiples cartes, et 7 figurines (dont deux exclusives, histoire d’attirer le chaland), KQ est réellement un monstre.
Concernant les figurines, il n’y a rien à redire, celles-ci sont réellement superbes ! Quel plaisir de disposer de personnages peints et de bonne qualité ! Elles donnent l’impression de prendre vie quand on les fait évoluer sur les différentes surfaces de jeu. Ces dernières sont constituées de plaques en carton d’une épaisseur insuffisante qui les fait bomber rapidement, ce qui ne permet pas d’avoir une aire de jeu plane : vraiment dommage, d’autant que malgré le peu de diversité dans les environnements, elles sont agréables à l’oeil. Du coup, en pratique, on a une surface de jeu instable qui a tendance à glisser au moindre déplacement d’un élément.
Mis à part ce petit défaut, il faut se rendre à l’évidence : le matériel a la classe lorsqu’il est disposé sur la table, et invite irrésistiblement le joueur à prendre part à l’aventure. Les éléments en carton, variés et en grand nombre, donnent du relief au plateau de jeu, ce qui permet une bonne lisibilité de l’ensemble. Cependant, les monstres sont représentés par de simples jetons qui se perdent un peu dans les décors. On aurait préféré des stand-up cartonnés qui auraient permis de plus facilement les identifier, d’autant plus que pour le noob, il est difficile de faire la différence entre les espèces de tofus et de bouftous !
Personnellement, j’ai eu (et j’ai encore) beaucoup de mal à repérer quel monstre est quel monstre… Ce soucis de lisibilité est exacerbé par le fait que les caractéristiques des mobs sont situés sur le verso des jetons. Alors oui, il existe des cartes avec la fiche d’identité de chacun, mais il n’est pas toujours facile de s’y référer, à nouveau à cause du soucis d’identification.
Par ailleurs, le nombre de jetons et de pions servant à représenter les ressources et marqueurs est exagérément important. Il oblige à d’incessantes manipulations et les personnes à grandes mains vont se tirer les cheveux devant la petite taille de ces éléments. Heureusement, et c’est la grande classe, l’éditeur a prévu deux coffrets de rangement afin d’éviter de se perdre devant la quantité de pions.
Malheureusement, aucune aide n’est disponible pour organiser ces casiers, et il faudra cumuler les parties pour comprendre comment classifier au mieux. De plus, il n’est pas toujours facile d’extirper les jetons de leur trou ! On ne va pas se plaindre, car dans de nombreuses autres productions, ces éléments sont laissés à la dérive dans de simples sachets zip (lorsqu’on a la chance que ceux-ci soient fournis !).
Pour en terminer avec le rituel de la description du matériel, je ne peux faire l’impasse sur les fiches de personnages. Celles-ci sont constituées de deux couches de cartons, ce qui permet de bien caler carte de personnage, bourse et inventaire sur celles-ci : un véritable plus qui augmente le confort de jeu !
L’ensemble est bien pensé et très fonctionnel, d’autant plus que des caches permettent de dissimuler les capacités non débloquées, ainsi que les sacs d’inventaire indisponibles. On regrettera simplement une découpe perfectible lors du premier retrait de ces caches, et une grande inconnue sur ceux qu’il faut garder et utiliser en jeu, et ceux qui sont censés finir à la poubelle.
Vous l’aurez compris, malgré les réserves que j’ai pu émettre (car je suis tatillon et que je trouve toujours quelque chose à redire), le matériel est vraiment d’excellente qualité et très bien pensé. Hum…. Je vous ai déjà dit que j’étais pénible… ? Un dernier mot pour signaler que la boîte a énormément de mal à fermer, une fois que la bête a ingurgité l’intégralité des éléments (petite astuce personnelle : ne pas hésiter à stocker des éléments de décors sous le thermoformage). Bon, cette fois, j’arrête !
Les Démons s’amusent
Dans la dimension perdue de l’Hormonde, les Démons des Heures se lassent de compter le temps qui passe. Jaloux de l’activité du Monde des Douze, ils décident de s’emparer de parties entières du monde et de kidnapper des aventuriers afin de les obliger à participer à des jeux cruels. KQ est le jeu qui met en scène ces joutes démoniaques. Mais même les Démons ont leurs règles !
Dans KQ, vous dirigez un de ces aventuriers à la merci du sadisme des Démons, et tentez de parvenir au bout de votre quête, dans l’espoir de vous libérer de leurs griffes. Sur le papier, ça a l’air super méga impressionnant, mais dans les faits, vous vous efforcerez de gagner des points de victoire sous la forme de Galons de la Gloire (les Ggs) !
Pour cela, différents modes de jeux sont proposés : le chacun pour soi, ou le mode coopératif. En mode « chacun pour soi », un des joueurs devra se charger de jouer le Démon et de gérer l’ensemble des monstres invoqués sur le plateau en s’efforçant de conserver une impartialité totale (rôle ingrat puisqu’il n’aura aucune possibilité de gagner, et servira simplement de faire valoir à ses compagnons de tablée), ou ce rôle sera endossé par chacun des protagonistes en alternance. Le mode coopératif opposera les aventuriers à un joueur Démon qui pourra vaincre seul, ou devenir la risée des héros.
Le livret de règles est plutôt bien organisé, même si on regrettera l’absence de glossaire (si vous avez l’habitude des jeux FFG/Edge, vous savez à quel point la chose est pratique). On se contentera d’un menu sommaire (ou d’un sommaire menu, à votre convenance) qui ne permettra pas forcément de naviguer avec aisance dans le livret. Ceci est véritablement dommageable quand on s’aperçoit que certains points de règles n’apparaissent que furtivement dans le texte : des erreurs de règles pourront donc s’inviter à vos tables au cours de vos premières parties. Quand on pense que les règles s’étalent sur 31 pages (même si toutes ne sont pas consacrées aux explications), on se dit qu’on aura vite fait de passer à côté de quelque chose…
Heureusement, pour vous aider à découvrir le jeu en douceur, il existe un Livret de scénarios, dont les sept premiers sont en fait des tutoriaux. L’ensemble est très pratique et didactique, même si on aurait pu regrouper certains d’entre eux : l’apprentissage se fait trop lentement à mon goût. En tout cas, cela demeure une excellente entrée en matière qui permet d’apprendre les bases tout en jouant. Ceci dit, ne rêvez pas, vous n’échapperez pas à la fastidieuse lecture du livret complet ! Le fascicule de scénarios comprend par ailleurs bon nombre de mises en scène qui promettent un bon renouvellement du jeu.
Justement, malgré plusieurs relectures assidues, on déplore quelques errances dans les règles que la FAQ située en fin de livret ne permet pas de lever. Je pense à la règle de tacle qui immobilise un personnage et dont on ne sait si elle est applicable aux déplacements des mobs, ou à la zone d’effet d’un des héros (la zone de souffle du Pandawa n’est pas indiquée). Rien de rédhibitoire car on trouve les réponses en parcourant les forums sur internet.
Malgré tout cela, on découvre un jeu complet, reconstituant avec fidélité une partie de jeu vidéo, à tel point qu’on a du mal à comprendre comment les designers ont intégré autant d’éléments qui semblent difficilement miscibles dans un univers cohérent : est-ce qu’on aura réellement le temps de profiter de cette quantité de possibilités au cours d’une partie ? J’avoue que mes premiers doutes s’installèrent à la lecture des règles. Wait and See comme il dirait !
Une impression de liberté totale
Aller, il est grand temps de se lancer dans une partie ! Nous choisissons de jouer en mode « chacun pour soi » avec un Démon incarné à tour de rôle. La mise en place est effectuée rapidement, et l’air de jeu se dessine devant nous.
Le joueur ayant le personnage à la plus petite initiative (valeur située à côté du petit éclair de la fiche de personnage) dispose deux tuiles de ville avec un phénix (où réapparaîtront les Krosmaster mis KO), un portail Zaap (permettant de passer rapidement d’un point à un autre moyennant un kama, la monnaie du jeu), un atelier de craft (où il sera possible de fabriquer les recettes achetées, si on possède les éléments nécessaires), et un hôtel des ventes (qui sert aussi bien aux achats qu’aux ventes).
Puis, par initiative décroissante, on place une tuile correspondant au type de monstres avec lesquels on aura décidé de jouer (tofus, bouftous, ou les deux), ainsi que des filons de minerai, des arbres, et autres joyeusetés. Il n’y a pas à dire, décidément le matériel donne envie de se lancer dans l’aventure !
Très rapidement, je vois qu’il va falloir se concentrer sur le gain de GG et que toute action non lucrative sera une perte de temps. Pourquoi me direz-vous ? Tout simplement, car à chaque tour de Démon, celui-ci va piocher trois cartes de la pile événements (le nombre de joueurs héros moins un) : ceci va rythmer la partie, car dans ces cartes figurent des apparitions de monstres, des pops de ressources, des modifications (assez anecdotiques) des prix à l’hôtel des ventes, et surtout des cartes de quêtes.
Ces dernières vont se cumuler sur la piste d’aventure, et permettront de gagner des GG en respectant leur ordre d’apparition (sachant qu’il y a toujours une quête disponible en début de partie). Le soucis est que quand cette piste est entièrement remplie et que le joueur Démon pioche une nouvelle carte devant s’y adjoindre, la partie s’arrête immédiatement, et le héros possédant le plus de points de victoire l’emporte.
Gloups ! Ça me paraît bien aléatoire tout ça ! Imaginons une partie qui voit le monde envahi rapidement par des hordes de monstres empêchant la sortie des héros de la ville (et oui, on n’a pas le droit de combattre depuis ou vers les tuiles de ville), ou une pénurie de ressources (alors qu’une des façons de gagner des GG est d’accomplir des quêtes personnelles dont certaines demandent justement d’abattre un arbre, d’exploiter du minerai, ou de… ramasser une bouse de bouftou !), ou pire encore une avalanche de cartes de quêtes qui mettent fin rapidement à l’aventure… Comment vraiment profiter de ce qu’offre le jeu alors qu’on sent la pression du temps en permanence ? Mais devait-on attendre autre chose de Démons des Heures ?!
Le jeu se transforme donc en course contre la montre pour cumuler des points de victoire… Du coup, on se demande quel intérêt a le joueur à prendre du temps pour fabriquer des armes (il dispose plus facilement de sorts sur sa carte personnage) ou même à pénétrer dans un donjon (et oui, le jeu propose de combattre des boss nichés au fond de sombres souterrains) ?
Bref, faisons abstraction de ces questions philosophiques et reprenons le cours du jeu ! Au début de son tour, le joueur doit décider s’il se met en mode combat (il aura le droit de lancer des sorts) ou en mode aventure (l’interdiction de combattre sera compensée par un intéressant bonus de points de déplacement).
Quoi, je n’ai pas le droit de me battre quand je pars ramasser des œufs ? En même temps, ce n’est pas très grave car les monstres sont déplacés par le Démon une fois sur deux (ceci en plus d’un contrôle en alternance par les joueurs) ! Et oui, ces petites créatures serviront bien souvent de faire valoir aux héros ! La seule chose qui pourrait faire hésiter un joueur à martyriser ces pauvres animaux est le système de drop, ce bonus récupéré quand un de ces petits anges vient à trépasser. Il faudra bien calculer son coup, car c’est le joueur qui met le coup de grâce qui s’empare d’un nombre de kamas égal aux points de vie du défunt monstre, ainsi que des ressources figurant sur le jeton du mob.
Le malheureux qui n’aura fait que contribuer au trépas de notre sac de sable sur pattes se contentera d’un modique kama de consolation et d’une ressource au choix parmi celles lâchées par le monstre. C’est cruel, oui, je sais !
Poursuivons notre périple sur les terres du Krosmoz, et parlons un peu de l’hôtel des ventes, étroitement lié à l’atelier de craft. Je ne saurai trop vous conseiller de les rapprocher au maximum dans la ville si vous souhaitez que le craft reste une option un brin pertinente pour les joueurs. En effet, vous pourrez vous débarrasser de vos ressources inutiles à l’hôtel des ventes (Je vous ai dit que les GG pouvaient également s’échanger contre des kamas ? Oui, vous pourrez acheter votre victoire !) , et acheter des recettes d’objets en tout genre (ou d’autres ressources).
Malheureusement, lorsque vous investissez dans une recette, vous ne connaissez que les ressources nécessaires à leur fabrication, mais vous n’avez aucune certitude sur ce qu’elle vous permet de concevoir (outre le fait que ce soit une arme, une armure ou un objet) : déjà que le craft ne semblait pas très intéressant, voilà que vous n’avez pas une maîtrise totale de ce que vous fabriquez ! Il ne vous reste plus qu’à espérer que le résultat sera à la hauteur du temps que vous avez consacré à la chose !
Au fur et à mesure de la partie, nos inquiétudes sur la pertinence d’une liberté totale dans un jeu de course qui semble brider nos actions se concrétisent. Les quêtes s’empilent sur la piste d’aventure, et on se dirige rapidement vers la fin de partie.
Malin comme un singe, j’avais largement anticipé le problème et avais décidé de récupérer un maximum de ressources et de ne pas trop me préoccuper de mes quêtes personnelles, afin d’acheter un grand nombre de GG en début de partie, sachant que le coût en kamas des points de victoire augmente avec le nombre possédé. La technique est une optimisation misérable du système de jeu, mais a le mérite d’être gagnante (et malheureusement, ceci sera confirmé dans nos parties ultérieures)… pas très palpitant pour un jeu d’aventure ! Vous êtes certains que le titre du jeu était bien Krosmaster Quest et non Krosmaster Rush ?
Un peu dépité par les événements, mon jeune fils décide de profiter encore un peu du jeu, et plonge seul au cœur du donjon, sachant qu’il a toutes les chances d’y perdre la vie. De toute façon, le temps de parvenir au Big Boss (le donjon est une succession de deux tuiles indépendantes du reste du plateau comprenant 4 monstres, puis 3 monstres et le Grand Méchant), la partie serait probablement terminée depuis longtemps (d’ailleurs, il ne parviendra jamais au bout du souterrain) ! On se penche donc sur les règles liées au donjon, et là, c’est le drame…
Dans le livret, il est indiqué que si tous les Krosmasters sont présents en même temps dans un donjon, le joueur Démon ne pioche plus de cartes événements, ce qui est plutôt bien si on veut profiter un temps soit peu du jeu. Cependant, il est également précisé que les monstres du donjon ne peuvent pas être contrôlés par un des joueurs dont le personnage se trouve dans le souterrain (ce qui est plutôt logique, car je doute que les joueurs ne s’attaqueraient eux-mêmes).
Mais si tout le monde est dans ce fameux donjon, il n’y a plus personne pour jouer le Démon ! Visiblement les designers n’ont pas pensé à tout ! Du coup, peut-on former un groupe avec la totalité des joueurs présents (comme dans un MMORPG, une des actions disponibles est la constitution d’un groupe d’alliés) ? Heureusement, il n’y avait qu’un krosmaster dans le donjon !
Je ne maintiens pas le suspense plus longtemps, j’ai facilement remporté cette piètre partie qui a véritablement manqué d’intérêt. Impossible de rester sur une telle désillusion, il nous fallait nous essayer au mode coopératif. C’est donc reparti pour une nouvelle salve !
Ready ? Action !
Nous repartons pour un tour dans le scénario « La Tofubine a bonne mine » où les héros doivent escorter un tofu rose dans les profondeurs d’un donjon, histoire de botter les fesses du Maître de Maison. Ce choix nous permettrait de nous faire une idée plus précise de l’intérêt de ces donjons. Quant au Démon, son objectif est de dévorer les GG des héros (il élimine les points de victoire en partant de la gauche de la piste de décompte, sachant qu’un Krosmaster n’ayant plus de GG ne peut plus en gagner, rendant l’équipe à la merci d’une victoire du Démon). Les Aventuriers devront donc veiller, en plus de leur objectif final, à maintenir leur échelle de points de victoire.
Très vite, on s’aperçoit que le superbe tofu rose va être un réel handicap pour nous, car cette stupide créature est incapable de rentrer en ville pour se mettre à l’abri des ennemis. Le soucis est que nos héros vont eux avoir à faire des passages dans la cité. Il va donc falloir faire très attention à ne pas laisser sans protection la bestiole colorée : un vrai coopératif en somme !
Le tirage des cartes événements est par ailleurs catastrophique pour nos héros en ce début de partie, faisant apparaître des mobs spéciaux nettement plus puissants que les monstres de base. Cela n’arrange clairement pas nos affaires, et la tofubine va connaître un nombre élevé de KO, sans que nous puissions y faire quoi que ce soit. Ainsi, le Démon se délecte avec facilité (et une satisfaction certaine) de nos GG.
Malgré ces coups du sort successifs, nous nous acharnons à nous équiper avant de plonger dans l’obscurité du donjon.
Je profite de la capacité spéciale de mon personnage (la superbe Katsou Mee bien plus sexy à mes yeux que son homonyme, même si son plastique (!) est bien moins avantageux) qui permet de fabriquer une arme avec une ressource de moins que celles requises.
Ainsi, je deviens le fournisseur officiel en armes et armures de notre petite équipe. Les monstres continuent de nous mettre la pression sur le plateau, mais la piste d’aventure peine à se remplir, ce qui nous laisse du temps pour faire nos petites affaires.
Une fois nos personnages bien équipés, nous nous précipitons vers l’entrée de l’antre de la bête.
Il suffit qu’un Krosmaster rentre dans le donjon pour que le reste du groupe ait l’opportunité de faire de même. C’est ce moment que nous choisissons pour faire une magnifique erreur de règles (qui est uniquement de notre faute) : nous continuons à piocher des cartes événements alors que tous les personnages sont dans les souterrains.
Evidemment, cela fausse la fin de partie, car l’apparition ininterrompue des mobs sur la tuile fait que nous n’arrivons pas à les mettre en déroute. Nous préférons mettre un terme à la débâcle, car la chose devient extrêmement répétitive.
Bien entendu, si nous avions appliqué les règles correctement, nul doute que nous aurions triomphé sans trembler ! En tout cas, ce mode coopératif semble nettement plus intéressant, même si j’ai un doute sur l’équilibre de ce mode, le joueur Démon semblant endosser à nouveau un simple rôle de faire valoir.
Retour sur Terre
Et bien, il y en a des choses à dire (et à redire) sur ce Krosmaster Quest, en témoigne la page pleine de notes qui trône sur mon bureau. Tout d’abord, ce KQ est clairement immersif de part son matériel qui claque et ses énormes possibilités. Il y a tous les éléments pour simuler un MMORPG et les bases sont vraiment là pour recréer l’ambiance d’un jeu vidéo. C’est simple, mes enfants en redemandent car ils ont l’impression de pouvoir pratiquer les jeux de leur tablette avec leurs parents : un véritable réseau local en fait ! Du coup, je prends beaucoup de plaisir à installer le monstre et à voir leurs yeux s’arrondirent sous l’effet de la satisfaction.
Malgré cela, ce plaisir est de courte durée, car nous nous sentons rapidement muselés au cours d’une partie. La sensation de ne pas avoir le temps de faire tout ce qu’on veut, et de ne pas pouvoir réellement profiter de toutes les possibilités du gameplay, est source de frustration. C’est une frustration que j’ai ressenti lors de ma découverte du récent Conan : les deux jeux sont bons et ont du potentiel, mais on reste sur notre faim avec une déception relative.
Ici, dans KQ, on a l’impression que les designers ont multiplié les éléments de jeu sans parvenir à créer le liant qui permettrait de tout utiliser. On se lamente du manque d’intérêt des donjons qui ne sont finalement indispensables que dans les scénarios de type « rush de donjon », de la faible puissance des armes et armures craftées par rapport aux capacités figurant sur les fiches de personnage, ou de la présence de panoplies permettant de fusionner 4 morceaux d’équipement (mais comment avoir le temps de crafter autant de choses ?!).
Le problème vient peut-être du fait que le jeu est compatible avec toute la gamme de personnages Krosmaster, ce qui est une bonne chose au niveau marketing, mais ce qui déséquilibre complètement le jeu. Il aurait probablement fallu créer une sorte de spin off dans cet univers…
Finalement, avec son humour très présent, le plumage de ce KQ attire irrésistiblement par ses nombreuses idées intéressantes et ses couleurs chatoyantes. Malheureusement, le ramage n’est pas à la hauteur et on regrette que cette juxtaposition de modules ne permette de nous plonger dans une véritable quête. Il manque indéniablement une véritable campagne à scénarios avec une vraie sensation d’évolution de nos aventuriers. En l’état, on n’a pas le temps de ressentir le souffle épique permettant de s’attacher à nos héros.
Il demeure un jeu simplement moyen qui fera le bonheur des plus jeunes (à partir de 10 ans) mais qui frustrera les adultes. Dommage que les promesses n’aient pu être à la hauteur des espérances, laissant ce KQ à l’état d’oeuf de tofu.
Merci à LSD graph pour les illustrations de l’article.
Un jeu de Murat Celebi et Pierre-François Fiasse
Illustré par Edouard Guiton et Xavier Houssin (pour la couverture)
Edité par Ankama
Langue et traductions : Anglais, Français
Date de sortie : 2015
De 2 à 6 joueurs
A partir de 12 ans
Durée d’une partie 120 à 180 minutes
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Sha-Man 03/03/2017
Excellent article.
Petite question cependant, est-ce que tu as essayé le mode où un joueur prend le rôle du démon à plein temps ?
J’ai peut-être raté quelque chose mais je n’ai pas l’impression que c’est le mode que vous avez joué pour l’escorte de la tofu rose.
Alendar 03/03/2017
L’escorte de la tofu rose a été joué en coopératif, donc avec un joueur prenant le rôle du Démon. Par contre, nous n’avons pas essayé le mode qui transforme un joueur en Maître du Jeu (il dirige les monstres et sert d’arbitre pendant que les autres se battent). A priori, les retours sur ce mode sont clairement négatifs. Cependant, je pense m’y essayer avant de me lancer sur un futur test.
Mendrock 03/03/2017
Ayant été un gros joueur de Krosmaster les années passées j’avais acheté les yeux fermés ce jeu en me disant que ça allait être génial, des amis aussi, on a fait une partie et cela nous a tellement laissé indifférent que l’on a jamais ressorti la boite :/ On a vraiment eu l’impression d’un jeu poussif avec pleins de règles et constatations qui nous ont refroidis (1pa pour faire ci, 2pa pour faire ça, ah si tu veux un équipement il faut perdre 2 tours pour revenir en ville, le premier joueur a gagné chaque partie d’initiation etc…)
Nous avons peut être mal jugé ce jeu mais il reste pour moi une grosse déception (on jouait avec le démon à plein temps chez un joueur, en l’occurence moi)