Inheritors, on ne se défausse pas comme ça ! 

Les jeux de société n’ont de cesse de vous le rabâcher : la monarchie, c’était pas fifou en matière de stabilité. Encore une fois, il vous faudra résoudre des questions de transmission du pouvoir entre héritiers prêts à se déchirer pour monter sur le trône dans un jeu de cartes qui n’est pas sans rappeler Lost cities de Reiner Knizia, mais ici jouable jusqu’à quatre. 

 

Inheritors, encore des fils à papa qui se bousculent au portillon

 

Inheritors, héritier lointain de Lost Cities

Pour marquer des points dans Inheritors, vous devez poser des séries de cartes Influence de même couleur. Les cartes vont de 1 à 6, et il y a beaucoup plus de 1 que de 6. Sachant que vous devez les poser scrupuleusement dans l’ordre, un 2 après un 1, etc. C’est ballot sachant que seule la dernière et plus haute valeur de chaque série comptera des points points à la fin. Bref, vous cherchez avant tout à récupérer des cartes Influence. Mais comment diable gagner de l’influence dans ce monde de cendre et de chaos ? 

Les illus sont signées Roxy Dai & Coda Ho


La particularité du titre vient du fait que tout ce que vous allez défausser ira au Marché (et défausser, vous allez le faire, et de bien des façons, car vous l’avez compris, c’est comme ça qu’on peut piocher). Cela signifie aussi que vous vous servez donc … dans la poubelle des autres. D’aucuns appellent ça le upcycling, enfin je crois. En tout cas, c’est pernicieux comme mécanique car elle vous susurre en substance tout au long de la partie “tu veux jeter ça ? Hmm … sûr ? Car on dirait bien que c’est la carte que ton adversaire attend non ?… mais tu fais bien comme tu veux, je suis qu’une mécanique je ne parle pas…”. Autrement dit, ce qui était avant un choix facile (j’en ai pas besoin, je défausse !) devient beaucoup plus lourd de conséquences, façon draft ouvert. Finalement, oui, un thème écolo aurait peut-être tout aussi bien pu fonctionner !

Bon, je peux lâcher quoi dans tout ça moi ?


On ne se défausse pas comme ça ! 

Le Marché est constitué d’une pioche et de trois colonnes sur lesquelles nous allons accumuler des cartes à force de défausser. Pour pouvoir piocher et ainsi trouver vos Influence chéries, vous pouvez soit défausser une et piocher deux cartes, soit défausser une et prendre toutes les cartes d’une colonne – ce qui semble plus juteux, mais c’est sous conditions. Il vous faut en effet défausser une carte qui soit de la même couleur ou valeur que la carte du dessus de la colonne que vous souhaitez récupérer. Ah, je vous le disais, défausser n’aura jamais été difficile ! 

Si vous avez trois cartes de même couleur, elles pourront être défaussées pour vous permettre de piocher de la Quête. C’est pas facile, là encore, d’avoir trois couleurs identiques inutiles, en plus les Quêtes ne servent à rien avant la fin de partie, où là elles peuvent se révéler utiles pour marquer des points avec ce qui traine dans votre main. Car les Quêtes disent des choses du genre “gagnez 2 points si vous avez au moins deux cartes de valeur 2 en main”. Elles vous poussent donc à garder des cartes qui potentiellement ne vous servent plus beaucoup. Je vous avais dis ou pas que c’était difficile de se défausser dans ce jeu ? 

ça fait toujours du bon point point qui va bien !

 

Mais tout de même. Heureusement viennent les Agents. Ce sont des cartes qui vont donner un peu de souplesse dans tout ça, mais un brin retorses. Le Conseiller permet d’aller chercher deux cartes au Marché, peu importe lesquelles, libre à vous, bon ça c’est cool. L’Espion permet de piquer une carte à un adversaire  – ouh méchant ! – mais encore faut-il la deviner correctement… Le Conspirateur permet de poser une carte dans une série en sautant une valeur seulement si on est en retard par rapport à un adversaire dans cette couleur. Là c’est de la souplesse tactique, c’est sûr. 

Avant ou après votre action, vous pouvez toujours rallier un Clan. Il y en a 10 dans la boîte, donc vous ne les verrez pas tous dès la première partie. Chaque Clan représente une couleur : si vous avez réussi à poser la carte de valeur 3 de cette couleur, vous remportez ce Clan, avec son pouvoir. Il s’agit là d’une capacité spéciale unique permanente, qui viendra vous filer un coup de main non négligeable, en twistant un peu les données. C’est ça les clans, ils savent si prendre avec les règles établies. À noter que les illustrations des Clans sont vraiment magnifiques. En tout cas les Clans vous donnent une orientation en début de partie, à adapter selon votre main. De toute façon, il faudra vous adapter dans Inheritors. J’ai mentionné le Marché sans cesse fluctuant et les Agents, mais ce n’est pas tout. 

Alors il parait que tu veux rejoindre un clan ?

J’aime bien les livres 

N’oublions pas les cartes Livres, qu’on aura bien envie de bazarder au Marché puisqu’elles fonctionnent comme des jokers, sauf qu’elles peuvent être bien juteuses en PV si vous êtes majoritaire à la fin – elles départagent d’ailleurs les égalités. Et vous avez aussi les Reliques qui rapportent un point si vous contrôlez la valeur la plus élevée de la couleur correspondante, mais enlèvent un point dans le cas contraire. On aura là encore bien du mal à s’en défaire ! Quoi lâcher une Relique qui au pire me fait -1 pour te donner 3 points ça va pas ? Mais que pourrais-je défausser d’autres ? Argh…

Reste à mentionner les Exploits qui mettent en place une course aux objectifs communs, du type révéler “trois livres dans votre main”, “avoir deux 4 de posés”, etc. Chaque Exploit rapportera un point à la fin et vous pourrez en décrocher plusieurs en un tour si vous êtes chaud.  

 

Bon, du coup, on l’adopte ou on le déshérite ?  

Avec son système original de Marché, les cartes d’Inheritors volètent souvent de main en main, de main au Marché. Vous voyez qu’avec toutes les informations croisées, il n’est pas si facile de prendre sa décision. Il n’est pas rare de peser le bénéfice/risque dans le fait de jeter/prendre une carte pour aboutir à des compromis difficiles. La lutte pour les points est serrée, il faut bien le reconnaître : il peut y avoir de beaux retournements jusqu’à la fin. 

Disons-le, les Clans ne semblent pas tous égaux, l’aspect aléatoire pourra paraître rédhibitoire, l’accumulation des façons de faire des points n’est sans doute pas d’une élégance folle, surtout si on le compare à du Knizia, forcément. Mais entre ce que l’on cherche à obtenir et à garder, et ce que l’on doit bien lâcher, cet Inheritors propose un enjeu qui ne manque pas d’intérêt et de tension. Les auteurs aux trois lettres, YWN (Kenneth) et CCH (Jeffrey, oui monsieur Eila), ne déméritent pas en cherchant une proposition qui n’essaie pas d’être efficace à tout prix, mais d’être suffisamment retorse pour taquiner les joueurs. C’est sans doute pour cela que La boite de Jeu a signé sa localisation – prévue pour la fin du mois. 

 

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