Hamlet : Chercher sa route, chercher son chemin

Hamlet, avant d’être l’oeuvre d’un dramaturge célèbre, est un mot anglais signifiant « hameau », soit « petit village ». Et c’est exactement le théâtre de jeu que nous propose l’auteur David Chircop (The pursuit of hapiness, …and then we held hands).

 

Dans Hamlet, vous allez développer un village ensemble, mais le jeu est complètement compétitif. Dans les siècles antérieurs au nôtre, les villages étaient généralement construits autour du bâtiment le plus important, celui où l’on se retrouvait, celui qui faisait généralement autorité. Bref, l’église.

Et c’est par les fondations de celle-ci que tout commence, même si sont déjà présents des lieux de production de ressources, un marché, une mairie. Le village est prêt à prospérer.

 

 

Hamlet se jouent en plusieurs tours, s’achevant par la construction de la dernière pierre du monument divin, où les joueurs vont étendre le village en rajoutant bâtiments et lieux de prestige, construire l’église, mais surtout construire un réseau de livraison de ressources. En effet, toutes les actions du jeu vont demander de dépenser de la matière première (bois/blé/pierre), ou manufacturée (lait/planche/brique/bois d’œuvre).

La première particularité du jeu est que les ressources présentes sur le plateau n’appartiennent à personne en particulier. Tout le monde y a accès et peut les utiliser pour leurs besoins, tant qu’elles sont disponibles. Elles sont en nombre limité et peuvent être rechargées par une action avec un petit bonus. Ainsi, il arrive fréquemment qu’un joueur produise de la pierre à la carrière, par exemple, et que cela soit le joueur suivant qui en profite. Une petite différence est notable sur les ressources manufacturées, car celles-ci sont bien identifiées à la couleur du joueur qui les a produites. Elles restent utilisables pour tout le monde, mais il y aura tout de même une compensation à celui qui l’a générée, au moment de leur consommation.

Le cœur de Hamlet va être la capacité de chaque joueur à mettre en place son réseau de transport entre les lieux qui produisent de la ressource (de base ou manufacturée) et là où on va en avoir usage. Pour cela, on va se faire aider de l’animal le plus efficace sur terre à cette période : l’âne.

Vous allez progressivement acquérir, placer et déplacer des ânes sur les tuiles village, et ceux-ci vont transporter les ressources, tuile par tuile. Mais ils doivent le faire d’un coup. Pas question de disséminer des ressources sur le plateau. Plus le village s’agrandira, plus votre réseau devra s’étendre et s’adapter.

Qui dit réseau dit aussi route ! Et on ne traverse pas les forêts. Il faudra donc que votre réseau suive toujours les chemins du village, ou construire un pont entre deux tuiles si nécessaire. La clé d’un village opérationnel, c’est son ordonnancement, et les chemins qui lient tous ces lieux.

Tout au long des tours des joueurs, ceux-ci vont s’efforcer, grâce à leurs meeples-paysans se promenant dans le village, à activer les différents lieux permettant diverses actions :  acquérir de nouvelles tuiles village, produire des ressources manufacturées (en y emmenant les ressources de base via le réseau d’ânes construit, vous l’avez compris), aller au marché pour livrer des commandes (toujours à dos d’ânes), construire des ponts (oui, oui, toujours avec vos ânes).

Vous pourrez aussi recruter de nouveaux meeples pour faire plus d’actions, moyennant finance (l’argent étant la seule ressource à ne pas transiter via le réseau). Et bien sûr, acheter des ânes supplémentaires, indispensables pour votre moteur de distribution.

À ce niveau de l’explication, je vous mets un petit « Hiii hann hihan hihan hihan » parce que les ânes, c’est vitaux.

Le jeu se termine quand l’église du village sera achevée (sa construction est une des actions possibles, généreuse en points de victoire, mais coûteuse). On comptera alors les points de diverses manières : ceux acquis durant le jeu (tuiles posées, marché, bonus de production), et ceux de fin de parties (distinctions, route la plus longue, ponts construits, …).

 

Chercher son chemin

Hamlet, issu d’une campagne de financement participative et arrivant maintenant dans nos boutiques, est une sorte de Pick & Delivery, soutenu par de la pose d’ouvriers assez classique, avec deux twists principaux : le fait que les ressources puissent être utilisées par tous les joueurs, un peu à la sauce communisme soviétique (on retrouve d’ailleurs ce concept dans Red Outpost), et la mise en place de ce réseau d’ânes devant s’adapter au cours de la partie.

Et c’est bien cet aspect du jeu qui le rend intéressant. On va devoir impérativement agrandir son réseau, s’adapter aux tuiles qui seront posées, tout en prenant en compte la disponibilité des ressources et leur emplacement dans le village.

 

On notera que le lait de la laiterie se fait à base de … moutons

Autre particularité du jeu : les tuiles ont des formes pour le moins biscornues. Oubliez les tuiles hexagonales à la Catane. Ici, les tuiles ont des formes tout à fait singulières, et votre village ne sera probablement jamais le même d’une partie à l’autre. C’est assez surprenant, ou déroutant, car on sera parfois obligé de placer nos tuiles à des endroits pas toujours avantageux, voire assez loin du centre du village, ce qui ne facilitera pas notre réseau.

Après avoir décrit ces bonnes idées, il y a tout de même un défaut qui nuit terriblement au jeu : sa lisibilité. Dans Hamlet, où la notion de réseau est centrale, il aurait été primordial que celui-ci soit parfaitement lisible. Or très rapidement, on n’y voit plus rien.

 

Les tuiles, quoi que joliment illustrées, sont un calvaire à lire sur le plateau. On a vraiment du mal à visualiser les routes du village qui s’étend, les tuiles étant trop petites et vite submergées des différents éléments du jeu (ânes, ponts, meeples…). Les illustration trop chargées, l’iconographie trop présente tout en étant peu lisible, particulièrement celle du coût de pose de tuile, qui n’a pourtant plus aucun intérêt après utilisation.

J’entends comme excuse que les tuiles de la version Kickstarter seraient plus grandes. Certes, mais je n’ai pas la version Kickstarter pour mon playtest ; et quand bien-même.

La compréhension des règles n’est aussi pas évidente. Il m’a fallu relire plusieurs fois le livret de règles pour bien comprendre, et les exemples manquent. Particulièrement sur l’utilisation des ânes qui, malgré un gros exemple bien chargé, manque de clarté, alors que cela est central dans la mécanique. De même, je ne suis toujours pas sûr d’avoir bien compris comment on calculait la route la plus longue en fin de partie…

La première partie peut se faire dans la douleur si on n’a pas réussi à appréhender la mécanique. Une mauvaise organisation de son réseau, ou un manque de ressources peut amener à des tours frustrants ou laborieux. Sans compter la possible analysis-paralysis pour exécuter les actions de transport dans le bon ordre, non aidé par la lisibilité générale du jeu. Cela a donné des parties particulièrement longues jusqu’à avoir vraiment envie que ça se termine, ce qui n’est pas un bon signe.

S’en conclut un petit goût amer de ce Hamlet. Il avait tout pour me plaire sur le papier, un thème de gestion de ressources qui me parle, un moteur de distribution à construire, un peu à la KeyFlower sans la partie enchère. Mais tout est gâché par cette lisibilité calamiteuse, qui ne donne aucune envie de recommencer l’expérience. C’est vraiment dommage. 

 
 
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2 Commentaires

  1. Ihmotep 14/11/2023
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    Dommage il avait l’air fort plaisant en terme de mécanique, mais la lisibilité est importante pour que le plaisir de jeu reste présent.

  2. zozo 28/11/2023
    Répondre

    La V2 arrive! il y a eu un autre finacement participatif pour un extension et l’amelioration des tous les défaut qui ont été remontés. J’ai la version KS et j’ai pris le pack d’upgrade pour la correction des défauts

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