Foire du Jeu de Longueil (Québec) : Le jeu dans tous ses états
Les événements ludiques sont très nombreux au Québec. Voici venue la foire du jeu de Longueuil, une commune accolée à Montréal, juste de l’autre côté du Saint-Laurent. Elle s’est déroulée il y a déjà quelques semaines, en voici un petit aperçu !
C’est dans l’école secondaire Gérard Filion que se déroulait pour la 6ème année consécutive cette rencontre de joueurs.
C’est une manifestation à but non lucratif qui reverse l’intégralité de ses bénéfices à l’école pour emmener ses enfants en voyage. Ce sont 10 000 Dollars Canadiens qui ont été récoltés encore cette année.
Laissez-moi vous présenter ce petit salon, ainsi qu’une interview d’Alex le Rustik qui présentait 5 000 ans de jeux, avec ses incroyables créations en bois.
Retrouvez en fin d’article des photos de parties en veux-tu en voilà !
Serment d’Hypothalamus
Je cache mon nom, car je ne suis pas digne,
de me dire amateur de jeux de société.
Trop souvent quand on me fait signe,
je néglige ma passion au nom de la sacro-sainte productivité !
Ce week-end est pour moi un long pèlerinage,
une occasion en or pour réaligner mes chakras ludiques.
Ça me rappelle un vieil adage,
L’expérience du tout sera toujours plus que la somme des parties !
Heureux sont les néophytes,
le royaume des joueurs est à eux.
Ces règles, il faut qu’on les explique,
pour que ça ne devienne pas trop laborieux !
Oh prêteur de jeux, je te salue,
tu es l’artisan de mon plus grand bonheur.
Cette collection, tu la perpétues.
J’en prendrai soin,
j’éviterai de manger ou de boire autour,
et la rangerai au bon endroit,
J’en fais le serment sur mon honneur !
C’est sur ces mots que la foire est chaque année inaugurée, la main sur le cœur !
Où l’on joue
Le lieu offrait un grand espace de jeu avec une bonne cinquantaine de tables entourées de plusieurs distributeurs présents.
Ilo 307 était présent avec toutes ses nouveautés et ses proto aboutis. Il était possible de jouer en avant première à :
- Scarabya
- Blue Lagoon
- Kero
- Just one
- 7 Wonders : Armada
À côté d’eux, le petit stand d’Archipirata présentait cette création ludique québécoise sur Kickstarter au moment du salon.
Un peu plus loin, Alex le Rustik présentait 5 000 ans de jeux à travers de sa passion/travail pour le monde ludique, les jeux traditionnels et leur histoire… Nous y reviendrons !
Le stand suivant était celui du distributeur Luma qui présentait ses dernières nouveautés comme Raids, Clans of Caledonia, Fairy Tiles…
D’autre part, la salle était cernée d’un mur de jeux impressionnant, tous disponibles à tout un chacun et ce principe très répandu au Québec permet à chacun d’avoir accès à un nombre de jeux incroyable. Des gloires d’antan telles Planet Steam, aux nouveautés comme Everdell ou Roots en passant par les curiosités comme Sideral Confluence…
Durant le salon, j’ai eu le plaisir de prendre des photos et de tester quelques jeux dont je vais vous parler en image un peu plus bas ! Galerapagos, Scarabya, Xia, Coatl (Prototype).
Où l’on échange
Le salon était aussi l’occasion pour tous les joueurs qui le désiraient de mettre des jeux en vente. Et là, je peux vous dire que les québécois sont de GROS consommateurs ludiques avec des collections immenses et mouvantes qui entraînent une quantité de ventes à la hauteur de la salle qui leur était dédiée.
Je pense qu’il y avait là plus de 500 jeux en vente à des prix plus ou moins intéressants. Ça allait des intégrales Rising Sun ou LOAD à De Vulgaris Eloquantia, beaucoup de bons titres à prix doux. Difficile de ne pas craquer.
Où l’on s’affronte
En marge, était organisé un beau tournoi Warhammer 40k, avec des tablées de figurines, de décors et d’aficionados. Ils se sont affrontés tout le salon pour la gloire et le plaisir visuel des curieux.
Au FJL on est là pour jouer
Si j’ai beaucoup joué lors du salon, je vous présenterai 3 titres phares que j’ai pu essayer sur place, avec 3 styles différents.
Galérapagos
Pour cette sortie récente, ILO307 avait mis le paquet en proposant une partie géante chaque jour à 10 joueurs qui allait récompenser tous les joueurs d’une boite de jeu, Galerapagos pour les gagnants, un autre jeu de la gamme pour les autres.
Galerapagos me fait pas mal penser aux Naufragés du Titanic (Lifeboat), pour ceux qui connaissent ce jeu de survie où tous les coups sont permis.
Au programme, une bande de survivants qui vont rassembler des ressources pour pouvoir nourrir tout le monde à la fin du tour. Tout en construisant suffisamment de radeaux pour que tout le monde s’en sorte.
Évidemment, chacun joue son tour et peut choisir des actions soit pour le groupe, soit d’autres plus personnelles comme aller fouiller les restes de navire échoué en espérant y trouver de quoi survivre, ou prendre le contrôle de ce petit monde avec l’unique arme du jeu…
Le jeu a rapidement viré à 2 groupes, et celui qui avait l’unique pistolet l’a méchamment remporté en éliminant les trublions qui tentaient de démontrer la supercherie. Parmi le groupe allié, 3 sur 5 s’en sont sortis, et il y a eu du fun mêlé à pas mal de frustration à la table. Il n’y a pas vraiment de contrôle ici. Et qui se fait des amis peut s’en sortir un peu plus facilement.
Cependant, si vous n’avez ni carte utile au groupe, ni moyen de menace, autant vous dire qu’il faut la jouer fine ! Quand un Lifeboat mettait en place une situation initiale asymétrique, mais relativement équilibrée, ici, les joueurs sont tributaires de leurs cartes, et un peu de leur tchatche. D’autant que la coalition de joueurs (jouer en couple qu’ils disaient) n’a pas aidé notre partie à pencher fort d’un côté.
Un jeu amusant, mais sans plus pour moi. Je lui préfère justement les Naufragés du Titanic dans la catégorie survie hyper agressive, alliance et baston.
Scarabya
Bruno Cathala et Ludovic Maublanc reviennent sur la mécanique à la mode de la pige commune, et chacun réalise l’action. Implémentée avec brio par NMBR9 notamment, la voici déclinée avec un board personnel ainsi qu’un principe de tetris qui n’est pas sans rappeler Patchwork, Barenpark et consorts.
Ainsi, chaque tour nous donne la forme à placer, et si nous avons tous le même plateau initial, des la première pose, tout diverge. Il y a de nombreuses possibilités pour tenter d’entourer les fameux scarabées et ce principe simple et abstrait remporte un gros succès par son efficacité et sa profondeur. On peut se prendre à réfléchir longtemps aux pièces restantes pour voir quel agencement sera le meilleur dans quel ordre.
La partie a duré 15 minutes, parfaitement calibrée. Le jeu est bien renouvelable avec une mise en place variable selon de très nombreuses combinaisons. (16 combinaisons placées en carré, que l’on peut tourner à notre guise, ça fait beaucoup !)
S’il n’y avait pas cette lisibilité moyenne des scarabées, le jeu serait excellent. Les couleurs de fond sont un peu trop vives hélas.
Je vous le conseille vivement !
Xia : Legends of the drift system
Xia, c’est un peu le fantasme qu’on avait gamin. Un jeu de science-fiction où l’on peut faire ce qu’on veut. Un sandbox (ou bac-à-sable) qui propose de faire du commerce, bastonner des pirates ou faire le pirate, réaliser des missions, bref, voir un monde cosmique se dérouler devant nous.
Et c’est complètement ça. Avec un scoring de partout permettant de choisir sa voie, avec des figurines prépeintes superbes, des vaisseaux à tuner et faire évoluer, des plateaux modulaires riches en différentes règles, avec des événements assez fous (la météorite !), avec tout ça on a jeu extrêmement riche, à l’immersion immédiate et aux règles à la hauteur de la richesse du jeu, c’est-à-dire nombreuses.
La où le jeu pourra diviser, c’est sur les dés. Xia est de base un jeu plutôt chaotique, et l’ajout de dés pour se déplacer fera rager les amoureux du 1 et rigoler les aficionados du 6-8-10-12.
Un jeu à prendre pour ce qu’il est, une grande aventure, longue, ambitieuse, chanceuse, avec beaucoup de manipulations, mais un vrai monde devant soi à arpenter. Le downtime en pâtit, à l’ère où l’on tente de le diminuer par tous les moyens, certains joueurs préféreront jouer à 3, et en partie moyenne. Qu’à cela ne tienne, le jeu le permet.
Personnellement, j’ai beaucoup apprécié cette expérience de 3-4h à 4 joueurs. J’ai été très impressionné dans les 2 premières heures, puis la mécanique a pris le dessus pour gagner.
Très bon, voire excellent avec les bonnes personnes.
Coatl
Les québécois ont la fibre entrepreneuriale et sont à l’origine de bon nombre de Kickstarter bourrés de passion ludique. Coatl est justement le projet de 2 passionnés qui se lanceront peut-être dans l’aventure quand leur projet aura atteint maturité !
Coatl est un jeu à objectifs variés qui n’est pas sans rappeler Takenoko. Les objectifs sont atteints en piochant dans un marché commun des parties de dragons.
Le tout sur une thématique des festivités asiatiques riches en figures et en couleurs à travers leurs farandoles de dragons… Le jeu a belle allure grâce à l’impression 3D !
Alex le Rustik, 5000 ans de jeux
Comme je vous l’évoquais plus haut, j’ai aussi rencontré Alex et ses superbes jeux en bois. Il les fabrique lui-même en matériaux 100% recyclés, trouvant à chacun un intérêt à la fois ludique et culturel.
Une personnalité ludique hors norme qui sillonne les salons ludiques québécois pour prêcher la bonne parole, celle du jeu en société, son histoire, ce qu’il révèle de nos us et coutumes, et celle d’un mode de consommation plus respectueux de notre planète… Petite interview !
L : Salut Alex, et merci de nous consacrer un peu de ton temps. Si tu avais 5 minutes pour nous présenter ton projet et tes motivations dans cette grande aventure, qu’en dirais-tu ?
A : Ma mission est simple : Participer à la préservation et à la diffusion du patrimoine ludique. Recycler la matière ligneuse et susciter les gens à vouloir se retrouver et communiquer. Mots d’ordre : Préserver-Diffuser-Recycler-Susciter.
L : Toutes les pièces que tu fabriques sont faites main, en bois précieux, mais surtout, 100% des matériaux utilisés sont issus de la récupération. Comment est-ce possible et pourquoi cette démarche ?
A : La récupération du bois m’est très facile car il s’en gaspille beaucoup. Mes sources de récupération sont les chantiers de construction, les rebus d’usine des moulins à scie, des meubles que les gens jettent à la poubelle, les ateliers d’ébénisterie… Bref il y en a beaucoup.
Je récupère parce que je trouve très triste de constater le gaspillage énorme de bois. Et je ne le récupère pas parce qu’il m’est « gratuit ». Il m’en coûte beaucoup plus en temps que de l’acheter neuf en magasin.
Et j’aime beaucoup l’aspect «sac à surprise » dans la récupération. C’est très plaisant.
L : Ce n’est pas tout d’exposer, peux-tu nous en dire plus sur les différentes activités attenantes à tes créations ludico-historiques ?
A : Depuis 24 ans, j’œuvre dans le milieu de l’animation que ce soit par la musique et la reconstitution historique. Dans le domaine ludique j’anime en milieu scolaire, dans les festivals, les cafés culturels, les bibliothèques, les fêtes corporatives, etc, bref partout où l’on veut de l’histoire et des jeux.
L : Le premier mot qui m’est venu à l’esprit après le mot « jeu » fut le mot « histoire », tu m’as répondu, « histoire des sociétés », en quoi l’histoire est-elle si intimement liée à tes créations ?
A : Simplement parce que toutes choses a une histoire à raconter. C’est exactement comme apprendre à connaitre une personne. Je parle ici de connaitre véritablement. L’histoire c’est ça. Et selon moi connaitre les histoires c’est tenter de mieux comprendre.
L : Nous sommes aujourd’hui baignés dans un monde ludique de consommation à outrance, comment un tel retour aux sources est-il perçu par le public ?
A : En fait mon but n’est pas tant un « retour » que la volonté de mettre en lumière ce qui existe déjà depuis longtemps. Et montrer aussi que le sillon dans lequel nous marchons nous a été tracé. On ne réinvente jamais la roue. Mais oui je note parfois une réticence face à mes produits et ce même avant de les connaitre, car ce qui est d’appellation « ancienne » ou plutôt « traditionnelle » est souvent vue comme dépassée et sans intérêt. Et quand ces gens se penchent et m’écoutent, j’éveille en eux beaucoup d’intérêt la majorité du temps. Je travaille beaucoup sur l’esthétique de mes jeux et c’est ce qui attire les gens.
L : Merci à toi de nous faire partager ta connaissance exceptionnelle de l’histoire des jeux ainsi que sa dimension sociale que l’on a trop tendance à laisser de côté aujourd’hui. Je te laisse le mot de la fin !
A : J’aimerais rajouter que dans ma démarche je me qualifie de prosélyte du ludisme (héhé). Un passionné, un gentil et très aimable prosélyte on s’entend. Oui je veux que les gens connaissent l’existence de ces jeux anciens simplement parce qu’ils sont là. Et de faire comprendre que le jeu est un puissant liant social. C’est un magnifique « débrancheur » sur tous les plans. On se retrouve pour JOUER ensemble. Le jeu est très éducatif sur le plan cognitif et comportementale pour tout le monde.
Pour aller plus loin :
Photos de parties en vrac !
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bgarz06 28/10/2018
Impressionnant cette foire du jeu.
T’en as de la chance ^^ Et en plus grâce à Ilo307 tu joues aux nouveautés !!!
TheGoodTheBadAndTheMeeple 29/10/2018
Oui c’est curieux, les nouveautes sont parfois en avance sur l’Europe, et parfois c’est le contraire, le rythme est juste different en fonction des distributeurs locaux.