Downforce : à fond à fond à fond !

Si vous êtes en train de lire ces lignes, c’est que vous avez déjà passé le seuil critique du thème de la course de Formule 1, et ainsi fait l’effort le plus difficile pour vous intéresser à ce jeu (à mon goût) !

En effet, un jeu sur les courses de F1 n’est pas le thème le plus sexy du monde. En tout cas, personnellement, quand Ludovox me l’a envoyé pour le chroniquer, je n’ai pas été très emballé par l’idée. J’ai par ailleurs eu à chaque fois pas mal de mal à le proposer à mes amis pour y jouer. Mais passé ce premier frein, j’ai envie de dire « attention pépite » ! Eh ouais, carrément. En effet, si le jeu présente quelques défauts sur lesquels je vais revenir, il procure un plaisir de jeu assez terrible, qui arrive à convaincre même les plus réticents.

Allez, allumez vos moteurs, c’est parti !

Ready, steady, pitch

Alors Downforce, comme sa couverture le montre bien, est un jeu sur les course de F1. Jeu de course oui, mais pas que ! C’est également un jeu de pari (dans l’esprit d’un Camel Up), agrémenté d’une petite dose d’enchères.

Un thème pas forcement courant, mais que l’on trouve occasionnellement dans le jeu de société, notamment FormulaD ou Rallyman, auxquels ont fait souvent référence. Je trouve que les sensations de jeu de ces titres sont très éloignées de ce que propose Downforce.

Et pourtant Downforce n’est pas une nouveauté, c’est une réédition de Top Race, sorti en 1996, qui lui-même prend ses racines dès 1974 avec Tempo. Le jeu a été légèrement revu pour cette ressortie chez IELLO, mais surtout graphiquement modernisé pour séduire le public actuel. C’est toujours un jeu de Wolfgang Kramer (entre autres papa de 6 qui prend, Linko, Mexica ou encore Tikal…), mais on retrouve désormais au générique deux autres auteurs, Justin D. Jacobson et un certain Rob Daviau.

Réalisées par Michael Crampton et Tavis Coburn, les illustrations du jeu sont soignées. La couverture est plutôt punchy, je la trouve tout à fait réussie. Le plateau de jeu en lui-même est assez agréable à l’œil et plaisant à jouer, sans être révolutionnaire – mais il faut avouer qu’il est difficile de sublimer un circuit de course vu de dessus tout en conservant une bonne lisibilité…

Downforce plateauJeu de societe-ludovox

 

Y a quoi sous le capot ?

Côté matériel, le jeu se compose principalement d’un très grand plateau et de cartes qui vont nous permettre d’avancer les voitures (notez que j’ai bien dit les voitures, et non pas nos voitures, c’est à ce moment là déjà que vous devez commencer à vous interroger sur le fonctionnement du jeu).

Downforce dispose également de quelques tuiles/sous-bocks qui représentent les pilotes que l’on va s’acheter, d’un calepin pour marquer les scores/paris, et bien sûr de 6 petites voitures en plastique. Alors ce n’est pas la panacée de la miniature, mais elles sont sympathiques et font le travail.

La boîte est plutôt bien dimensionnée – au vu de la taille du plateau, et tout y rentre bien (pas besoin de thermoformage ici).

downforce materielJeu de societe-ludovox

Phases de jeu

Pour un aperçu rapide des règles, je ne peux que vous conseiller de vous jeter sur le Ludochrono réalisé par Ludovox il y a peu. Peur ceux qui préfèrent un bref brief textuel, ce qu’il faut retenir c’est qu’il s’agit d’un jeu de course et de paris, qui se joue en deux grandes phases.

La première phase (15% du temps de jeu) consiste en des enchères, pendant lesquelles les joueurs vont tenter de se payer des voitures en hypothéquant de futurs points de victoire, afin qu’elles leur rapportent des points en fin de partie si tant est qu’elles sont bien placée, et cela en fonction des cartes qu’ils ont en main (distribution aléatoire de début de partie).

La deuxième phase est la course à proprement parler, qui consiste à jouer tour à tour une carte de sa main pour avancer une ou plusieurs voitures d’un montant indiqué sur la carte. Cette phase sera entrecoupée à 3 reprises d’un pari où les joueurs pourront essayer de deviner quelle voiture remportera la course, afin de gagner à nouveau pas mal de points.

À la fin, vous totalisez les points cumulés entre vos paris gagnants et la position de votre/vos pilote(s), auquel vous retranchez les points dépensés pour l’acquisition de vos pilotes, et le joueur qui s’en sort le mieux remporte la partie.

C’est assez simple à expliquer et à jouer, et terriblement efficace. Les parties se jouent en 40 minutes environ, quel que soit le nombre de joueurs. Jouable de 2 à 6 joueurs, cela permet une belle flexibilité et de le sortir en de multiples occasions.

 

Sensations au volant

Concernant la compréhension globale et l’explication du jeu à de nouveaux joueurs, c’est plutôt du genre super accessible. Le fait qu’il y ait deux phases ne nuit pas vraiment à la compréhension du jeu. On se lance donc rapidement dans le feu de l’action sans trop d’interrogations.

Lors de la première phase, on est amené à enchérir sur les pilotes ET sur les pouvoirs qui les accompagnent. Cette phase est un peu délicate la première fois, car les pouvoirs ne sont pas forcement faciles à appréhender lors de la première partie, ni la valeur des enchères qu’il faut proposer. Mais tout roulera sans souci lors de la deuxième partie en tout cas.
Cette phase du jeu n’est pas vraiment la plus excitante, les enchères cachées n’étant pas propices à vraiment « s’éclater », mais elle est nécessaire, et permet une première mise en chauffe tranquille, afin de découvrir un peu plus les cartes que l’on possède (et de pester quand un duo voiture/pouvoir nous passe sous le nez à cause d’un tout petit point de surenchère). 

Qu’on se le dise, ces pouvoirs sont une vraie bonne idée. Ils permettent un renouvellement des parties car ils typent la manière de jouer. On est titillé entre aller chercher le pouvoir qu’on estime le meilleur, ou en essayer un que l’on a encore jamais eu. Mais il est tout a fait possible de jouer sans, pour découvrir le jeu lors de la première partie, ou pour jouer avec des enfants.

Quoi qu’il en soit, cette phase est assez courte, et on va vite passer à la course à proprement parler.

downforce voitureJeu de societe-ludovox

La course en elle-même a un fonctionnement terriblement simple et efficace. Lors de son tour, on se contente de jouer une carte de sa main (on n’en repioche jamais), d’avancer les voitures indiquées, et de passer au joueur suivant. Ce n’est pas plus compliqué que cela. Mais attention, derrière cette simplicité se cache un choix très retors et malin, qui ne saute pas du tout aux yeux au premier abord.

D’une part, les cartes que vous possédez sont distribuées aléatoirement. Vous aurez peut-être des cartes qui vous permettent d’avancer beaucoup de voitures spécifiques de beaucoup de cases (pas forcement vos voitures, du coup !), et d’autres qui permettront de déplacer les voitures de votre choix d’un petit nombre de cases. Vous devrez jongler avec ces cartes que vous connaissez dès le début de partie (et qui ont du orienter votre choix durant les enchères pour récupérer les voitures dont vous avez beaucoup les couleurs).
La subtilité du jeu est que vous devez avancer toutes les voitures mentionnées par votre carte. Vous serez donc très souvent contraint d’avancer les voitures adverses d’autant de cases que vos propres voitures, voire plus. Il vous faudra ainsi gérer votre main durant toute la partie, et ce sera à vous de juger si telle ou telle carte est à utiliser maintenant ou plus tard dans la partie.

Carte downforce

Une carte d’action, qui permet d’avancer énormément les voitures jaune et bleue.

 

Bille en tête

Mais la chose la plus importante, que l’on ne comprend pas tout de suite, c’est l’importance de la piste de course. En effet, les déplacements des voitures ne sont soumis grosso modo qu’à une seule règle : on ne peut dépasser que si on a la place de le faire. En effet, si plusieurs voitures sont devant la vôtre, et qu’il ne reste plus de case de route disponible, votre voiture ne pourra pas avancer (utiliser les déplacements des cartes), et cela a deux conséquences :

  • D’une part, à votre tour, vous serez obligé d’avancer les voitures de vos adversaires qui font bouchon devant vous, avant de pouvoir espérer avancer la votre. Un sacrifice nécessaire si vous voulez un jour pouvoir avancer de nouveau la votre, et qui fera la joie de vos concurrents.

 

  • D’autre part, ces situations de bouchons seront utilisées par vos adversaires pour justement activer les cartes qui auraient pu faire avancer vos voitures, afin de les rendre caduques ! Et c’est là que le jeu prend tout son sel. Rien de pire que voir les adversaires jouer des cartes qui pourraient faire avancer votre pilote de 5 ou 6 cases, et de le voir positionné juste derrière une voiture concurrente qui va l’empêcher d’avancer.

 

C’est grâce à ce système que le placement, et les déplacements, que vous allez jouer vont s’avérer bien plus stratégiques qu’il n’y parait de prime abord. Il faudra tout faire pour vous placer en tête dans les goulots d’étranglements où les voitures ne peuvent pas se doubler, afin d’éviter d’être le dernier de la file indienne, ce qui s’avérerait assez critique.

Pour cela on compte, on calcule, on essaye d’optimiser nos déplacements et de « désoptimiser » ceux des pilotes adverses que nous sommes obligés d’avancer via nos cartes. Il se dégage un génial sentiment de réussite lorsqu’on arrive à sacrifier les cartes qui avanceraient les adversaires – mais voir les adversaires y parvenir est aussi un crève-cœur, parfois un brin frustrant. Ce genre de jeu « agressif » doit être difficile à accepter pour des enfants, mais entre adultes consentants… c’est plutôt jouissif.

downforce en jeuJeu de societe-ludovox

La voiture rouge arrive la première dans le virage, le bouchon risque de se créer derrière elle.

 

On crée souvent des alliances éphémères entre joueurs en queue de peloton afin d’essayer de se rapprocher du premier joueur. Alliances qui, bien entendu, volent en éclat assez rapidement lorsque l’un des joueurs arrive à rattraper son retard. Il s’avérera tout de même assez dur de rattraper son retard si vous êtes le dernier dans le premier entonnoir de la piste, tant les écarts peuvent se créer vite dans ces conditions. C’est souvent à cette occasion que le joueur en tête prend de l’avance et qu’il s’avérera assez difficile à rattraper. J’ai en effet vu assez peu de parties se retourner complètement jusqu’ici, et je trouve que l’issue de la partie est quand même plus ou moins fixée dès la première difficulté passée (du moins avec des joueurs peu aguerris au jeu).

Mais attention, finir premier ne suffira pas, puisqu’il y a les paris pour compenser cela. En effet, les 3 spots de paris de la partie sont assez intéressants. On essaye de les passer en tête pour que les adversaires misent sur nous et nous aident à finir la partie en premier afin de rentabiliser au mieux leur paris. Mais cela peut être à double tranchant car un joueur qui finit en tête en ayant tous les paris sur lui (les siens y compris), remportera forcément la partie. Il faudra donc peut-être essayer de contrer le joueur en tête à tout prix pour lui voler la victoire.

 

Configurations optimales

Côté configuration et nombre de joueurs, j’ai ressenti un léger déséquilibre. Le jeu est très plaisant à jouer à 3 tant est que tous les joueurs se partagent 2 pilotes. Idem à 6 joueurs où chacun en conduit une. Le jeu se fait beaucoup plus bancal à 4 et 5 joueurs, où certains auront plus de pilotes que d’autres. C’est assez difficile à expliquer, mais cette inégalité se ressent beaucoup dans la partie. Les joueurs ayant 2 voitures s’en sortent souvent mieux car lorsque l’une est bloquée, ils ont souvent l’autre pour compenser, là où les joueurs avec une seule voiture voient leurs tours sacrifiés (et avoir rapidement le sentiment que la partie est perdue).

Mais à l’inverse, un joueur ne possédant qu’une voiture faisant un démarrage canon aura du mal à être rattrapé, puisqu’il n’a pas à s’occuper d’en avancer une deuxième. Bref, un sentiment un peu mitigé sur ces asymétries-là, et je préfère les configurations symétriques qui ont déjà bien assez de paramètres à gérer (pouvoirs et cartes).

Les parties à 5 et 6 joueurs sont elles beaucoup plus chaotiques. Étant donné l’importance des zones de rétrécissement, il faut calculer au mieux notre passage dans ceux-ci. Or, c’est tout bonnement infaisable lorsque 5 personnes rejouent avant votre tour. Il faut donc accepter ce chaos, et prendre Downforce un peu plus à la légère. Mais entre joueurs « amateurs/experts » je recommande la configuration à 3 joueurs, qui est la plus taquine et plaisante.

 

Déjà une extension, avec de nouveaux circuits.

 

Au finish

Downforce s’avère un vrai coup de cœur, de ceux auxquels on ne s’attend pas : rien de mécaniquement innovant, un thème peu excitant de prime abord (pour moi en tout cas), mais un plaisir de jeu ine fine assez jouissif, via une mécanique finaude mais accessible.

Le tour de jeu a beau être simplissime (jouer une carte), la gestion de sa main et la réflexion autour du choix de la bonne carte est cornélienne, avec une profondeur surprenante. Il y a bien sûr un nombre de stratégies possibles assez limité, et il faut accepter une forte dose de chaos, mais le plaisir est bien là.

Les pouvoirs que l’on récupère sont intéressants et taquins, et peuvent retourner une partie lorsqu’ils sont bien utilisés. Ils peuvent être difficiles à appréhender lors de la première partie, mais offrent ensuite une belle rejouabilité au jeu.

Attention cependant aux différentes configuration (à trois, quatre ou six joueurs), qui ne sont pas toutes idéales et qui changent pas mal le ressenti. Il est à noter qu’une extension est sortie le 14 décembre 2018, rajoutant des pouvoirs mais surtout de nouveaux circuits qui me semblent terriblement sympathiques !

Bref, une très belle découverte, que je vous invite à essayer au plus vite !

 

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4 Commentaires

  1. Garion 11/01/2019
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    Tu as eu l’occasion de le tester à deux joueurs ? quelles impressions ? Et tu le verrais à partir de quel âge? (Les recommandations officielles sont rarement réalistes). Merci en tout cas pour ce retour qui fait envie !

    • Dhjaz 12/01/2019
      Répondre

      Garion tu m’ôtes les mots du clavier.

    • El Gringo 12/01/2019
      Répondre

      Je n’ai encore encore eu l’occasion d’essayer à deux joueurs, mais j’avoue que ce n’est pas une configuration qui m’attire plus que ça. Le jeu permettant de jouer à 6, je le propose plutôt quand on est très nombreux. Coté gameplay ça soit être moins chaotique et plus calculatoire je pense.
      Pour la limite d’age, de nombreuses adaptations sont possibles. Je pense que si on enlève les pouvoirs des pilotes, voir même la phase d’enchères qui n’est pas évidente à faire comprendre, et donc de se concentrer sur la course en donnant à chacun une voiture au hasard ça descend facilement à 7 ans. Avec toutes les règles, 10 ans me semble approprié

  2. fa 14/01/2019
    Répondre

    Bonsoir, je l’ai testé et je n’ai pas du tout été emballé…. je préfère de loin formula one….

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