Crazy Karts = Mario Kart the boardgame ?

Ils sont quelques-uns à vouloir essayer de retranscrire en jeu de plateau l’ambiance du célébre opus de Nintendo, Mario Kart. Récemment, c’était Titan Race qui s’y était essayé, et ne s’en était pas mal sorti. Et voici donc Crazy Karts, qui se lance à son tour dans la course. Voyons voir s’il arrive à se mettre au niveau ou même à dépasser ces prédécesseurs.

Des règles en ligne droite, avec quelques légers virages.

La première particularité de Crazy Karts, c’est que chaque engin sera dirigé par deux joueurs. Chacun des joueurs aura un cadran de contrôle, différent de celui de son partenaire, ainsi qu’un paravent et un paquet de 6 cartes, chaque carte comportant une, deux ou trois roues (ou bien des volants ? honnêtement, je n’en sais rien). Pour simplifier, disons qu’un des joueurs contrôle les freins et le volant, et l’autre l’accélérateur. Rassurez vous, même si vous êtes un nombre impair, il y a moyen de jouer, j’y reviendrai plus tard. Chaque engin aura également un compteur pour marquer sa vitesse, et une jauge d’énergie.

Le petit truc en plus du jeu, celui qui doit le différencier des autres, le cœur du jeu même dirais-je, c’est qu’il est absolument interdit aux joueurs de la même équipe de communiquer. Tout en contrôlant des capacités différentes voir contradictoires du bolide Vous la voyez venir l’embrouille? A noter que pour une fois, votre paravent vous servira non pas à vous cacher de vos adversaires, mais de votre partenaire !

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Le matos de l’équipe elfe

 

Les tours de jeu sont assez simples. Au début de chaque tour, les joueurs piochent simultanément des cartes dans leur paquet, puis vont les programmer sur les différentes actions de leur cadran. Quand une équipe a fini, elle compte jusqu’à 5, et alors les autres doivent s’arrêter. On résout ensuite les actions programmées, avant de faire un nouveau tour. Vous avez compris, le kart qui finit la course en premier a gagné la partie. Mais voyons un peu dans le détail comme ça se passe.

Tout d’abord, la pioche. C’est simple, plus on va vite, moins on piochera de cartes. C’est marrant et c’est thématique: dans la panique, on contrôle moins bien ce que l’on fait et quand on va vite on a moins le temps de réagir.  

Ensuite, la programmation. Les joueurs peuvent programmer autant de cartes qu’ils le veulent sur autant d’actions qu’ils le veulent de leur compteur. Plus il y aura de roues sur cette action (rappelez-vous, les roues sont sur les cartes), plus les effets de cette action seront importants. Par exemple, si vous mettez 3 roues sur « accélérer », vous augmentez votre vitesse de 3. Pour résoudre, on commencera par regarder quelle équipe a mis le plus de roues sur l’action « initiative ». C’est elle qui commencera à jouer. Elle déroulera toutes ses actions dans l’ordre, puis ce sera la deuxième équipe dans l’ordre d’initiative etc… Bien sûr, certaines actions peuvent être laissées libres, mais celles qui ne le sont pas doivent être exécutées.

Les différentes actions sont donc les suivantes (un des membres de l’équipe a toutes les actions paires, l’autre toutes les actions impaires) :

1. Initiative: On vient d’en parler.

2. Capacité spéciale: Chaque équipe joue un peuple parmi les elfes, les nains, les gobelins (original, dites !) et les momies (ah, ça, un peu plus). Et bien sûr, chaque équipe a un pouvoir spécial. Mais je vous expliquerai les pouvoirs ensuite.

3. Utilisation d’un « power-up »: Comme dans tout bon jeu de ce genre, il est possible de récupérer des équipements à usage unique, les « power-up ». On les récupère notamment en passant sur certaines cases du parcours. On a les classiques accélérateurs, missiles à têtes chercheuses, « étoiles » qui rendent invincibles, etc. On ne pourra en utiliser qu’un par tour, et chacun a un coup en roue qu’il faudra placer sur l’action 3 pour l’activer.

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Quelques power-up

 

4. Customisation spéciale : Normalement, il n’y a pas d’action 4. Mais le jeu a un mode « avancé » (en fait, aucune raison de ne pas jouer dans ce mode) dans lequel les équipes piochent chacune une action spéciale parmi 4, qu’on utilisera ici en payant le nombre de roues nécessaires. Idem que pour le 2, je vous détaille cela plus bas.

5. Freinage : Vous vous en doutez, ça sert à freiner. On baisse la vitesse de 1 pour chaque roue posée ici.

6. Accélération : J’imagine que avez compris. Et c’est là qu’on voit qu’il faut que les deux membres de l’équipe veulent faire la même chose, sinon l’un risque de freiner alors que l’autre veut accélérer, et ils vont s’annuler l’un l’autre.

 

C’est une fois qu’on a modifié la vitesse avec l’accélération que le kart va se déplacer. Le déplacement est simple: on se déplace en ligne droite d’autant de cases que la vitesse du Kart. Vous noterez qu’on a pas pu tourner avant. Et c’est dommage si on a pas pensé qu’on risquait de percuter un des bords de la course, un des concurrents ou un obstacle posé au milieu du chemin.

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Le kart bleu avec sa vitesse de 3 va récupérer un power-up avant de se manger un bon gros rocher en bout de course.

 

Vous vous en doutez, cela impliquera souvent que les karts qui percutent ou se font percuter prennent des dégâts, plus ou moins en fonction de leur vitesse. Au niveau des obstacles, encore une fois on retrouve les classiques: il y aura bien sûr des rochers dans lesquels on s’encastrera, des lacs gelés qui nous feront dévier de trajectoire, des tremplins etc. Une fois percuté, un obstacle est détruit, ouvrant ainsi la voie aux suivants.

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Un aperçu des obstacles

 

Une fois le déplacement fait, on reprend les dernières actions:

7. Tourner : C’est seulement maintenant qu’on va pouvoir tourner. C’est là qu’il faudra que le joueur au volant ait prévu correctement, pour ne tourner que si nécessaire. Il n’y a que deux directions possibles, en avant vers la droite, et en avant vers la gauche. Tourner signifie donc passer de l’une à l’autre. Pour tourner, il faut avoir joué au moins autant de roues que la vitesse du kart au moment de la résolution de l’action. Idem, le joueur au volant a intérêt à s’être demandé si son partenaire n’allait pas accélérer ce tour-ci, sinon, le kart ne tournera pas.

8. Tirer : Et oui, les karts ont des canons. Bien sûr. Plus il y aura de roues sur cette action, plus vous tirerez loin. Si un adversaire est à portée, on pioche une carte dans le paquet des cartes dégâts, et on l’applique. Les effets sont alors très variables: on peut avoir un effet tir manqué où rien ne se passe, ou bien, à l’autre bout du spectre, endommager sérieusement une des commandes du kart adverse, rendant l’action correspondante plus couteuse en nombre de roues pour pouvoir la réaliser.

9. Accumuler de l’énergie : Chaque équipe a une jauge d’énergie qu’elle peut remplir grâce à cette action. Quand la jauge atteint 10, paf on a un power-up. C’est la seconde façon d’en obtenir.

10. Réparer : A force de percuter des murs, des obstacles ou des adversaires, les karts vont accumuler des dégâts (bizarrement, assez peu suite à des tirs de canons). Ceux-ci sont représentés par un marqueur qui descend petit à petit sur le compteur de vitesse, et va limiter celle-ci. Si le marqueur de dégâts est sur 5 par exemple, ma vitesse sera limitée à 4. L’action « réparer », vous avez deviné, fait remonter ce marqueur d’une case vers le haut par roue posée dessus.

 

Les options en plus

Bon, vous savez presque tout sur le jeu mais il y a encore quelques petites choses en plus.

Déjà, les pouvoirs des peuples: Les elfes peuvent récupérer des power-up en étant à côté des cases correspondantes, et pas forcément dessus. Les nains peuvent percuter des obstacles sans en appliquer les effets, les gobelins peuvent tourner avant la phase de freinage et d’accélération. Enfin les momies peuvent attraper un adversaire avec un lasso de bandelettes et le rapprocher d’elles, éventuellement pour l’envoyer dans un obstacle (mon pouvoir préféré).

Ensuite, les pouvoirs « optionnels » du mode avancé. Ceux-ci ne sont pas transcendants, beaucoup moins intéressants selon moi que ceux des peuples. On pourra au choix: faire plus de dégâts quand on percute un kart adverse, charger plus vite la jauge d’énergie, choisir parmi deux cartes dégâts si on tire au canon ou récupérer deux power-up si on remplie la jauge d’énergie ce tour-ci. Bien mais pas top.

Je vous l’ai dit, même si on est un nombre impair, on peut jouer quand même. Un des joueurs sera tout seul dans son kart et sera le Loup Solitaire. Il aura un panneau de contrôle unique, sans les actions 2 et 4 (pas d’actions spéciales pour lui, bien fait), mais avec deux actions tourner, droite ou gauche. Il faudra donc choisir la bonne pour tourner correctement.

Là, vous vous dites que c’est un poil idiot : il le sait le gars, vers où il va tourner. Sauf que, pour ajouter un peu de chaos à ce joueur qui ne doit pas tenir compte de son partenaire, il piochera au hasard à chaque tour deux jetons. L’un deux rajoutera une roue sur une des actions, et l’autre bloquera une action qui sera inutilisable ce tour-ci. Je n’ai pas encore essayé, je n’ai pas d’avis pour le moment.

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Le matériel spécial du loup solitaire.

 

Le jeu est censé se dérouler en deux manches : une phase de qualification et la course proprement dite. La première phase permet de se positionner sur la ligne de départ, de commencer à accumuler des power-up, d’endommager ses adversaires et de récupérer des bonus si on la gagne. Il y 5 bonus différents : un bouclier, un canon à longue portée, etc. Je n’aime pas trop cette idée de qualification, le jeu est assez long comme ça, donc je n’ai pas essayé ces bonus, mais ils ne m’enthousiasment pas eux non plus.

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Les bonus en question.

 

Dernier point, le matériel. Celui-ci oscille entre le bof et le pas mal. Côté bof, on a les karts, vilains au possible, les illustrations assez moyennes, et le fait qu’il est difficile de savoir quelle équipe contrôle quel kart : c’est la couleur des cartes qui l’indique. Logique, on regarde les cartes pour connaître son kart. Je vous jure que quand on parle de ce jeu, cette homophonie rend la discussion infernale. Côté pas mal, il y a la qualité du matériel cartonné : les tuiles sont très épaisses, les plateaux de la course sont recto-verso pour plus de variété. Bref, c’est sympa.

Et puis, il y a des petites vannes qui se glissent partout, sur les paravents notamment. Le matériel de chaque équipe a une illustration personnalisée, et dernière chaque plateau programmation, il y a une petite phrase vous incitant à jouer plutôt qu’à fouiner partout. C’est tout bête, mais ça met une ambiance sympa quand on met le jeu en place.

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Ici le dos d’un paravent momie, et le dos d’un cadran elfique. A noter que leurs homologues sont différents.

 

Ah, et tant qu’on est dans le matos, il faut parler de l’objet le plus « Kèssssékessetruc? » que j’ai vu dans une boîte de jeu. Après le marqueur premier joueur inutile, Mesdames et Monsieur, j’ai le plaisir, et l’honneur, de vous présenter…

roulement de tambour…

le jeton…

roulement de tambour…

wait for it….

roulement de tambour…

wait for it…

roulement de tambour…

du gagnant! Le jeton du gagnant. (TSINNNNG)

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Tadaaaaaaaam!!!!

 

Oui, il s’agit d’un jeton bouteille de champagne à donner au gagnant quand la course est finie. C’est à dire quand vous rangez la boîte. Je suis sans voix, je ne sais même pas quoi dire.

Alors, je la balance ma console et j’achète le jeu à la place?

Il faut reconnaître que Crazy Kart récite sa gamme : canons, pouvoir spéciaux, power-up à récupérer, obstacles, humour, chaos créé par la non-communication entre les partenaires. Et ça se joue jusqu’à 8, c’est plus que Mario non?

Malheureusement, il l’exploite assez mal. Tout d’abord, le cœur du jeu, cette coopération qui devrait parfois échouer entre les partenaires et dont devrait venir le fun et le chaos, et bien, elle marche trop bien. À chaque tour, il est toujours très évident de savoir quoi faire au tour prochain, et donc les deux partenaires sauront ce que fera l’autre. Le cas de « j’ai prévu de faire ça, mince tu as prévu autre chose » n’arrive jamais. Du coup, cet aspect qui est, encore une fois, le cœur du jeu, tombe à plat. Et entraine un peu tout avec lui.

Quelle est la cause de ce manque de choix ? D’abord, à cause de la disposition des obstacles et de l’étroitesse de la piste: les obstacles forment souvent une ligne continue en travers du chemin. Et donc, à moins de passer derrière un concurrent (cela arrivera de temps en temps), on en prendra forcément un à chaque « ligne » d’obstacles. Et comme on tourne après s’être déplacé, il est très facile au début de chaque tour de compter combien de cases on a en face à soi et de régler la vitesse en conséquence, et ensuite de tourner le volant selon cette vitesse.

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Vous le voyez le problème?

 

Et puis mettons qu’il y ait un obstacle sur le chemin. Percuter un obstacle a en général deux conséquences : des dégâts et la vitesse qui tombe à zéro. On pourrait croire que c’est embêtant, mais en fait pas du tout. Pour les dégâts, on peut les soigner dans le même tour. Comme on sait en général qu’on va percuter un obstacle, il suffit de mettre le paquet sur la réparation. Ce n’est d’ailleurs pas grave de prendre beaucoup de dégâts: les hautes vitesses sont inaccessibles, encore une fois car les obstacles sont beaucoup trop proches pour qu’on aille si vite.

Et puis la vitesse qui tombe à zéro, c’est plutôt un avantage, puis il suffit de mettre une seule roue ensuite pour tourner. Autre avantage d’avoir une vitesse à zéro, c’est que vous aurez toutes vos cartes en mains au début du tour, et cela fait beaucoup de roues. Et donc, aucun problème pour remonter à la vitesse de votre choix, percuter un obstacle, tourner si besoin, soigner tout les dégâts, et recommencer ! Et si besoin, vous aurez aussi assez de cartes pour mettre le paquet sur l’initiative pour être certain de jouer en premier. C’est comme ça que c’est passé le dernier tour des deux parties que j’ai jouées.

En fait, commencer un tour à haute vitesse n’offre strictement aucun avantage, puisque on peut retrouver très facilement n’importe quelle vitesse quand on part de zéro. C’est assez dingue dans un jeu de course, non ? Ce qui est bizarre, c’est que l’on se rend compte de cela assez vite. J’ai du mal à comprendre comment cela a pu échapper à l’équipe en charge du jeu.

Autre souci, même si on a plusieurs plateaux recto-verso qui selon les illustrations donnent l’impression de variété, au final c’est simplement la disposition des obstacles qui change, mais qui reste selon ce modèle de route barrée.

Et puis, comme il est frustrant de tirer sur un adversaire et de tomber sur « manqué ! », ce qui arrive une fois sur 3 quand même. Les effets de power-up laissent souvent indifférent.

images.duckduckgo.com

Mario a encore de beaux jours devant lui.

 

Le jeu souffre donc d’un mal assez étrange : les joueurs ont trop de contrôle. Les dégâts ne font pas si mal, ce qu’on a programmé se déroule en général comme prévu, on sait quasiment toujours ce que va faire notre partenaire et on est jamais vraiment contraint dans ce que l’on va programmer car on aura souvent toutes les cartes en main. Où est le chaos (et donc le fun) ? Même les autres concurrents l’apporteront assez peu, car on les percutera rarement.

Et tout ça c’est vraiment très dommage, parce que je pense que toutes les idées du jeu sont plutôt bonnes. Ce qu’il manque au jeu, selon moi, ce sont simplement des réglages. Est-ce qu’il faut revoir la position des obstacles ? Le nombre de cartes en main ? La réparation des dégâts ? Je penche sur la première proposition. En créant des chemins alternatifs, il y aura des choix de trajectoires à faire, et on aura ainsi plus de mal à savoir ce que va choisir notre partenaire.

En conclusion, je pense que le jeu peut trouver son public, notamment avec de jeunes enfants, qui n’ont peut-être pas la capacité de bien voir comment programmer et anticiper. Pour les plus expérimentés, je crois vraiment qu’il ne faut pas changer grand chose pour rendre le jeu beaucoup plus fun et chaotique. Mais cela doit prendre par contre un peu de temps. À vous de voir si vous êtes prêt à ça.

 

Crazy Karts,

Un jeu de Charles Amir Perret
Illustré par Aga Jakimiec, Anastasia Meilous, Maria Pekina, Rafal Szyma
Edité par Portal
Langue et traductions : Anglais, Autre
Date de sortie : 06-2016
De 3 à 8 joueurs
A partir de 8 ans
Durée d’une partie entre 45 et 60 minutes

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4 Commentaires

  1. motlockbob 30/03/2017
    Répondre

    Pour l instant c’est Rush n Bash qui s en sort mieux au niveau copié de Mario. Même au niveau illustration.

  2. eolean 03/04/2017
    Répondre

    Alors, juste pour info, il y a aussi steampunk rally dans le même genre, même si là on se rapproche plus d’un « diabolo et satanas » 🙂

  3. Shanouillette 03/04/2017
    Répondre

    Titan race a aussi ce petit côté mario kart !

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