Charterstone Digital : viens dans mon quartier !
Charterstone digital est l’adaptation du… clivant, dirons-nous, jeu Legacy de chez Stonemaier Games et ici porté par le Studio ACRAM. Il s’agit d’un jeu de pose d’ouvriers dans lequel chacun des joueurs construit son quartier (ses emplacements d’action privilégiés). Il existe de multiples façons de marquer des points, allant du remplissage de contrats à la construction de bâtiments, l’ouverture de caisses, le remplissage d’objectifs ou des moteurs de points plus obscurs. L’expérience laissait un goût étrange en bouche.
Une campagne de Charterstone se déroule en douze parties ! Charterstone Digital vous proposera cela en ligne, ou hors ligne, avec la possibilité de jouer en hot seat avec le même device, et vous pourrez régler la force des IA en allant de “facile” à “très difficile”.
Disponibilité : le jeu est disponible aux alentours de 11€ sur le store Apple, 10€ chez GooglePlay et 16€ (!) sur Steam. Et le tout en la langue que vous souhaitez (anglais, français, bien entendu, mais pas que : un effort de localisation a été fait, et bien fait).
Play me !
Curieux de voir comment le machin tient sur la machine, je lance l’appli. Même direction artistique (un peu plate), même narration (décevante, mais vous vous attendiez vraiment à une histoire folle ?), mêmes mécanismes à une exception près (on y reviendra). Charterstone Digital est une réplique parfaite, à peine plus illustrée, de son prédécesseur de carton. Et pourtant, avec les animations, la clarification d’un grand nombre de points ergonomique (les Périls étaient des mini cubes très faciles à rater/oublier, alors qu’ils peuvent être très importants). Certes, on n’a pas le plaisir de gratter la limaille de fer d’une carte et d’en mettre partout sur sa table basse, ni de coller un autocollant de traviole sur son plateau, ni de tenter d’inscrire quelque chose au stylo bille sur le papier glacé d’une carte – un grand plaisir du genre – mais on se trouve à évoluer sans efforts dans ce système qui bouge sous nos impulsions. De 60 minutes, les parties descendent à quinze ou vingt. Vous pouvez jouer plusieurs campagnes en parallèle. Bref, beaucoup d’avantages pour ce Charterstone digital. Et pourtant, ayant pratiqué la version physique, la version numérique manque d’un petit quelque chose de palpable : le travail effectué sur la personnalisation du jeu de base était bien intégré aux mécanismes et cette conscience du plaisir matériel crée un petit creux dans l’application. Rien de méchant, qu’on s’entende, mais c’est suffisant.
Ensuite, il y a le jeu lui-même, un peu froid et lisse, pas très palpitant, un peu grindy. Le portage ne l’aide pas à gommer ce défaut mais au moins, l’aspect répétitif passe plus vite.
Techniquement parlant
Techniquement parlant, nous avons affaire à de la belle ouvrage, avec pléthore d’options pour rendre le jeu plus joli ou plus performant suivant la bécane utilisée : beau job, le studio ACRAM ! Une fois chargé, le jeu se déroule fluidement et sans accroc (un crash sur toute la durée de ma campagne, cependant). Par contre, en mobile, l’appli est un siphon à batterie très impressionnant : impossible pour moi de jouer hors secteur. Bon, je sais que j’ai un smartphone vieillissant, mais tout de même, je fais tourner d’autres jeux bien plus longtemps. Et ce même après avoir coché les options d’économie (moins d’animations).
L’habillage sonore se fait discret et s’oublie facilement, mais ne détonne pas non plus. De toute façon, je gage que la majeure partie des joueurs jouent en silencieux.
Ergonomie
L’ergonomie est toujours un point délicat pour les applis, et celle-ci ne fait pas exception. Charterstone est en effet un jeu très prolixe en information et il faut tout surveiller en même temps. Sur un petit device (téléphone), impossible de tout afficher. Il faudra alors circuler dans une multitude d’onglets et sous-onglets au demeurant plutôt bien fichus, mais qui interrogent sur l’expérience utilisateur à long terme. En début de partie, par exemple, j’aimerais systématiquement connaître les cartes au marché et les objectifs publics… mais il faut que je navigue de menu en menu pour avoir ces infos. De même, certaines séquences de jeu ou informations qui arrivent tard dans la partie sont légèrement survolées, et on n’a pas intérêt à les manquer ou à trop patienter entre deux parties, sous peine de se retrouver un peu largué (et à oublier de profiter des renouvellements de gameplay, dommage pour un Legacy !).
Malgré ces quelques heurts, l’expérience utilisateur est plutôt bonne et bien pensée, et laisse une bonne marge au joueur, qui peut réduire certaines informations pour conserver la lisibilité.
Problème du jeu de base, on se retrouve vite avec un grand nombre d’emplacements d’action (36 emplacements sur les quartiers des joueurs + 5 communs, sachant que certains ouvriers peuvent avoir des pouvoirs spéciaux en plus). Fort heureusement, le jeu nous empêche de succomber à l’information overload en nous grisant les lieux inaccessibles par manque de ressources. Nos confrères d’Ars Technica pointent du doigt la difficulté à zoomer/dézoomer sur la version Steam du jeu, que je n’ai pas testée : carton jaune !
Cramer la chandelle par l’autre bout
Si vous n’avez pas joué à Charterstone physique et comptez le faire, spoiler alert ! Et idem si vous êtes sensible au spoiler sur la version digitale, mais autant le dire, connaître ou non ce détail n’aura aucune incidence dans votre campagne. Sinon, restez.
Une des parties de Charterstone vous demandait de jouer à la bougie. Si la bougie fournie s’éteignait, hop, une conséquence se déroulait pour le joueur dont c’était le tour. Cela agissait comme timer et comme circonstance extérieure, mais était rigoureusement gadget. Porté en application, on trouve seulement un mécanisme de contrainte supplémentaire (ne pas poser d’ouvrier sur une île), certes terne par rapport au gadget, mais tout aussi fonctionnel, sinon plus.
Verdict
On trouvera donc en Charterstone un très bon portage, qui facilite grandement les choses et propose une expérience plus satisfaisante par certains aspects (et bien moins chère). Cependant, les petits plaisir du Legacy vous sont ôtés au profit d’une progression sans accroc ; un peu dommage, certes, de ne pas vivre de sensations fortes, mais c’est le lot de ce jeu : un peu pâle, grindy et répétitif, mais plaisant tout de même.
Et pourtant, en ayant fait ma campagne d’environ 6-7 heures, je me dis, pourquoi pas en refaire une ? Ou une partie, épisodique, de temps en temps, en cas d’insomnie ? Sans doute le signe que la rejouabilité est bien au rendez-vous. En tout cas, si l’on me demande si j’ai envie de me faire une campagne physique vs digitale, je prends l’appli sans hésiter.
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