Great Western : ah la vache!
Beaucoup de mécaniques sont présentes dans GWT, qui se situe dans la lignée de Caylus (pour les bâtiments que l’on construit le long d’un parcours / active / améliore), Russian Railroads (pour les locomotives qui avancent sur une piste, débloquent des bonus) ou Mombasa son illustre prédécesseur (pour les actions bonus, la règle à tiroirs avec de nombreuses finesses et exceptions à assimiler, le recyclage de la défausse). Des références tout à fait réjouissantes pour tout amateur d’eurogame qui se respecte, à première vue.
Pourtant…
Pourtant, je relève un déséquilibre dans ce jeu. D’un côté, le tour de chacun est simplissime (il est à la portée de tout le monde d’avancer son pion de 3 ou 4 espaces : c’est du niveau « petits chevaux »), mais de l’autre, le nombre des options, des mécaniques en présence, des axes de scoring (11 rubriques de score sur la fiche de marque !!) dont on ne sait lequel prédomine, et l’absence de structure globale du jeu (il n’y a pas de « manches » à proprement parler et tous les joueurs ne reprennent pas leurs pions en même temps) noient la visibilité de son propre résultat à long terme, car en plus de ne pas pouvoir « mesurer » l’impact précis du choix de ses actions unitaires sur le résultat final, il faut gérer l’aléatoire de la pioche de son deck. GWT est un peu en celà un jeu « too much » qu’on aurait pu épurer de 1 ou 2 mécanismes (Les Tipee bof bof, le prolongement de la ligne de chemin de fer au-delà de San Francisco ne sert pas à grand-chose vu qu’il n’y a plus de tuiles gares). Ce doit être la marque de l’auteur car j’avais d’ailleurs formulé la même remarque à l’encontre de Mombasa. Mais par rapport à Mombasa, on est encore un cran au-dessus dans la complexité, la structure en moins (dans Mombasa, il y a des manches et une approche plus frontale car une compagnie se développe au détriment d’une autre).
Car même si ce parcours jusqu’à Kansas City peut paraître répétitif aux yeux de certains, le plateau est réécrit à chaque partie au gré des bâtiments que l’on y place, de leur séquençage (qui permettent des combos + ou moins puissantes), et du cadencement que les joueurs s’accorderont à donner à la partie (rapide avec peu de bâtiments ou lent avec beaucoup d’aménagements / embuches sur le parcours). La courbe d’apprentissage, de fait, est énorme et justifie peut être une prise en main déroutante, que dis-je, « étourdissante » de possibilités mais nécessite aussi d’avoir dans son entourage quelques joueurs suffisamment experts qui s’investissent à l’éprouver régulièrement.
Au stade des premières parties, je garde une légère préférence pour Mombasa. Non que GWT soit mauvais, mais il manque de structure et de lisibilité par rapport à mes goûts personnels. A trop vouloir proposer, on fait le lit de l’analysis paralysis et des oublis mineurs en cours de route qui peuvent parfois s’avérer lourds de conséquences sur le déroulé d’une partie (L’Effet papillon, vous connaissez ?), ce qui au bout du compte diminue le plaisir ludique. Il faut arrêter de prendre pour acquis que le modèle ultime du jeu expert doit se situer dans des règles complexes à tiroirs ou l’adjonction exhaustive de toutes les mécaniques existant et ayant existé. Au contact de ce 2ème jeu, j’ai un peur que ce soit le leitmotiv d’Alexander Pfister pour concevoir ses jeux experts, à moins qu’il ne s’agisse de la « surcouche Eggertspiele ». Toutefois, le jeu est bon, c’est incontestable, mais un peu long à 4 (3h+ pour des habitués sans retour à la règle).



