Unita : des dés pour faire la guerre, mais sans les faire rouler

Troisème volet des légendes Helvetia, entendez par là le 3ème jeu d’Helvetia Games après Helvetia Cup et Shafausa, Unita se propose de vous faire revivre les guerres qui menèrent à l’unité de Helvetia. Jeu d’affrontement donc, de 2 à 4 joueurs, chacun pour soi ou en équipe, loin des habitudes des wargames ou autres jeux d’affrontement d’armées, Unita vous propose de représenter vos unités par des dés dont la valeur indiquera la force, et de vous déplacer sur un chemin à sens unique (le sentier de la guerre) menant à un portail, les combats prenant part lorsque vos unités se trouvent en face des unités adverses. Les sentiers de la guerre « s’enroulant » autour du portail central, vous aurez toujours à faire face aux deux mêmes adversaires.

Le matériel

À l’ouverture de la boite, le ton est donné : moult dés, quelques tuiles, un plateau (recto-verso selon le nombre de joueurs), et bien sûr le livret de règle (en 3 langues, Français, Anglais et Allemand).

La boitel'intérieur de la boite

Quatre set de dés donc, de quatre couleurs pour chacune des armés. Que les ameritrasheurs calment leur joie, ici on ne lancera pas les dés, tout au plus les ferons nous pivoter sur une de leur face. Le ton graphique est plutôt réussi, et les couleurs, les symboles, les quelques tuiles, le background d’introduction de la règle réussisent à nous immerger dans l’univers, d’Helvetia même si la vue de ces nombreux dés désignant des unités armées rappellent que l’ambiance d’une partie risque plus de se rapprocher d’un jeu abstrait que d’un jeu épique de guerre. L’utilisation des dés pour représenter des unités dont la force correspond à la face fait irrémédiablement penser à Quantum qui emprunte aussi ce système de représentation d’unités. J’y reviendrai dans la conclusion de cet article.

Alors ces dés ?

dé vertLes dés ne sont pas tous identiques. Chaque armée est constituée de 16 dés. Selon la valeur de la section (terme utilisé pour désigner une « unité », autrement dit un dé de son armée), un certain nombre de faces seront vierges. Ainsi pour une section de valeur 5, toutes les faces porteront un symbole alors que pour une unité de force 1, seules deux faces ne seront pas vierges.

Le dé vert ci-contre désigne une section du peuple Primitiva (les hommes), natifs d’Helvetia, de valeur 4. La valeur maximum d’une section se reconnaît au chiffre en rouge.

Le symbole du peuple (ici la croix helvétique) désigne la valeur 0. Ainsi, ce dé comportera les faces 4 (chiffre en rouge), 3, 2, 1, 0 (le symbole) et une face vierge qui ne sera pas utilisée.

Les dés sont assez jolis avec leur texture marbrée (voir photo). Ils ne sont pas gravés mais devraient résister à l’épreuve du temps puisqu’ils ne sont pas lancés et manipulés, juste posés et déplacés sur le plateau de jeu.

Les autres peuples sont Friburga, les nonnes (dés rouges) qui sont alliés à Primitiva. Hexagone (dés bleus) et German Land (dés jaunes) représentant les voisins qui cherchent à conquérir le jeune pays naissant.

dé rougedé bleudé jaune

Les cartes

Un set de 3 cartes par peuple représentant les 3 pouvoirs est à la disposition de chaque peuple. Au cours de la partie, une seule pourra être jouée au choix du joueur, les autres retourneront alors dans la boite. Les cartes sont en carton simple, assez épaisse compte tenu du fait qu’elles ne sont pas manipulées.

cartes vertescartes rouges

Primitiva possède des pouvoirs guerrier lui permettant d’avoir +1 en force d’attaque sur un dé (Hallebarde), d’infliger 1 de dégat à un adversaire avant le combat (Arbalète) ou de charger avec la Cavalerie, c’est-à-dire d’attaquer avec les unités à l’arrière. Les nonnes (Fribourga) portent des pouvoirs aux noms évocateur : Confession (transformer une valeur 1 en valeur 2), Girl power permettant de gagner toutes les égalités au combat et Pélerinage affectant les déplacements.

cartes bleuescartes jaunes

Hexagone vous apportera de la Gloire (plus de PV pour une compagnie) et vous permettra de faire régner la Terreur en combattant deux fois d’affilée. Et bien sûr, que ne serait l’Hexagone sans son terrible pouvoir de Grève permettant de refuser un combat. German Land quant à eux pourront faire preuve de Discipline et d’ignorer les effets d’un terrain, ou utiliser leurs Technologies 1 ou 2 permettant d’avancer en groupe ou d’imiter un terrain adverse.

Les tuiles

Les tuiles désignent des terrains spéciaux qui seront placés sur le plateau au début du jeu. Chaque peuple en possède 3, deux standards (une montage et une forêt) et une tuile spécifique à son sentier de la guerre. 

Les tuiles sont en carton épais et joliment illustrées. L’iconographie rappelant les pouvoirs est suffisamment explicite. 

Les tuiles spéciales représentent la Forêt magique de Primitiva, la Croix rouge de Friburga, le Mirage de German Land et le Tourbillon d’Hexagon.

Je ne sais pas vous, mais l’illustration choisie pour la croix rouge me fait plus penser à un volcan qu’à une infirmerie permettant de soigner une compagnie. Les nonnes de Friburga seraient-elles volcaniques ?

Le plateau de jeu

Ou plutôt devrais-je dire les plateaux de jeu. En effet, Helvetia Games a eu la bonne idée d’utiliser le recto et le verso afin de proposer un plateau spécifique pour 3 joueurs et un autre spécifique pour 2 ou 4 joueurs. À noter que sans cela, le jeu n’aurait pas été jouable à 3 joueurs puisque la mécanique du jeu ne tient que si un sentier de la guerre est encadré par deux autres sentiers.

Plateau 2 ou 4 joueursPlateau 3 joueurs

À première vue les plateaux semblent fouillis mais la configuration des sentiers de guerre imposent de « mélanger » ainsi les textures. Un choix très « fonctionnel » aurait été de mettre une couleur unie pour chaque sentier mais les plateaux auraient alors laissé croire qu’il s’agissait d’un jeu de Wallace wink. À l’usage, les plateaux sont très clairs et agréables à regarder. Design réussi donc pour ce qui me concerne.

La règle de jeu

Celle-ci est un grand livret qui occupe toute la boite. Elle est claire, bien illustrée et les rappels des points importants dans la marge permettent en quelques dizaines de secondes de se remémorer ceux-ci sans avoir à relire entièrement la règle lorsque le besoin s’en fait sentir. À noter qu’une vidéo proposée par l’éditeur permet d’avoir un bon aperçu des règles en moins de 5 minutes.

Règle de jeu

Le papier épais et glacé rend le livret agréable à lire et à parcourir. Les encadrés de textes d’ambiance permettent de renforcer le thème tout en s’évitant facilement pour qui ne s’intéresse qu’à la mécanique. En revanche, je ne suis pas fan de ces grands formats que je trouve peu pratique à lire sans avoir à poser la règle sur une table. Et oui, j’aime bien lire une règle affalé dans mon canapé ou allongé dans mon lit. Il faut bien prendre des forces avant de se lancer dans les affrontements que propose Unita !

Du bon matos

En conclusion de cette présentation du matériel, je dirais que celui-ci est plutôt de bonne facture et réussi sur le plan graphique. Il n’est pas pléthorique, bien entendu, étant donné la nature du jeu, et malgré les efforts consentis pour nous plonger dans le tome 3 de l’histoire d’Helvetia, il n’arrive pas à nous faire complètement oublier que l’on aura plutôt à faire à un jeu abstrait qu’à un jeu nous racontant une histoire. 

C’est bien beau tout ça, mais on fait comment pour se massacrer ?

Bon, je vois que vous êtes impatients d’en découdre et que l’art, à part celui celui-ci de Sun Tzu, c’est pas votre truc. Et bien vous allez être servis car vous allez pouvoir rapidement passer à l’action. En effet, les règles s’expliquent en moins de 10 minutes et ne comportent que très peu de mécanismes. Le plus long à expliquer sera certainement le placement initial. Celui-ci n’est pas fixe, et fait partie intégrante de la partie. En effet, si les positions des terrains de chaque sentier de la guerre sont déterminées par les dés, l’ordre des terrains sur le sentier sera choisi par le joueur. De plus, la composition des compagnies, et la position de chaque section dans celles-ci et l’ordre dans lequel elles avanceront est complètement déterminé et choisi par le joueur. C’est une partie intégrante de la stratégie.

Bon, je parle de compagnie, de section, mais qu’est-ce que cela veut dire ? En fait, chaque case sur le sentier de la guerre permet d’accueillir 4 dés (sections) formant une configuration 2×2. C’est ce qui forme une compagnie. On déplacera donc les compagnies en suivant le sentier de la guerre, case après case. Notre sentier étant encadré par deux sentiers adverses, il arrivera qu’une compagnie en se déplaçant présentera son flanc, voire ses deux flancs, à une compagnie adverse. Deux des sections (dés) de la compagnie feront alors face à deux sections adverses. Un combat a alors lieu.

Ci-contre est représentée une configuration de combat (*image extraite du livret de règle). Deux section de Primitiva (vertes) font face à deux sections d’Hexagone (bleues). Elles vont s’affronter. Le résultat du combat ne laisse pas place au hasard puisque c’est la valeur la plus forte qui l’emporte. En cas d’égalité, aucune des deux sections n’est blessée. Une section qui a perdu un combat voit sa valeur diminuer de 1.

À la fin du combat, les deux sections de front de chaque compagnie engagées dans le combat passent à l’arrière, et les deux compagnies à l’arrière constituent désormais le front. Le combat s’achève alors.

À cette règle de combat, il faut ajouter la règle de déplacement qui est vraiment simple. À son tour un joueur doit utiliser exactement trois points de mouvement, en sachant qu’avancer une compagnie d’une case sur un terrain standard coûte 1 point de mouvement et 2 points pour un terrain spécial.

Voilà expliqué en quelques lignes, l’essentiel des mécanismes. À ceux-ci se rajoutent les effets des terrains spéciaux (6 en tout), et des pouvoirs (3 par joueurs), et bien sûr la mise en place.

Un jeu aux règles simples à expliquer. Toute la richesse se situe dans la tactique adoptée au cours de la partie. Les mouvements seront cruciaux et il faudra bien y réfléchir à deux fois avant d’avancer ses compagnies. Le fait de devoir utiliser impérativement ses trois points de mouvement est une contrainte à ne pas négliger sous peine de devoir engager un combat perdu d’avance.

Et cette guerre alors ?

Unita est un jeu simple, de par sa règle de jeu, mais bien retors dans sa façon d’y jouer. En effet, on comprend vite dès les premiers coups qu’il va falloir faire attention et ne pas foncer tête baissée. Il faut anticiper les mouvements adverses, guetter le moment où ils seront contraints et bien se positionner. L’utilisation des terrains spéciaux peut donner des effets intéressants qui peuvent surprendre lors des premières partie. 

Bon, vous l’aurez compris en lisant le descriptif du matériel et les quelques lignes ci-dessus, on est loin d’un wargame ou d’un jeu d’affrontement classique. Comme prévu ce jeu est plus proche d’un jeu abstrait que d’un jeu thématique, même si le matériel et la lecture de la règle permet de s’en affranchir un peu, et même d’éviter de rebuter a priori les joueurs allergiques à ce type de jeu. 

Au final, Unita s’avère un très bon jeu de placement tactique, qui ne laisse pas place au hasard. La courbe de progression me semble assez importante et un joueur débutant aura peu de chance face à un joueur plus expérimenté. Par rapport à Quantum que j’ai cité plus haut, j’ai finalement été moins gêné par l’utilisation des dés. Peut-être que ces groupes de dés avançant étaient finalement moins éloignés de la vision d’un bataillon en marche que les dés de Quantum ne l’étaient de vaisseaux spatiaux. De plus, la rotation des dés correspondant à un affaiblissement de l’unité est moins surprenante que la reconfiguration du vaisseaux. Serais-je plus sensible aux carrés Napoleoniens qu’au nanobots ?

En conclusion, je dirai que si vous cherchez un jeu abstrait thématisé de placement et de déplacement tactique, Unita est fait pour vous. Le jeu en équipe, que je n’ai pas encore pu essayé malheureusement, devrait apporter un énorme plus en introduisant discussions et manoeuvres coordonnées. Si vous avez aimé Quantum et que vous êtes sensible au thème d’Unita, le jeu devrait également vous plaire. En revanche, si vous cherchez un jeu d’affrontement plus classique, je vous recommande plutôt 1812, l’invasion du Canada ou 1775: Rebellion qui permet également le jeu en équipe (je ne les pratique que dans cette configuration tant le jeu est plus riche et intéressant ainsi) et qui permet une vraie immersion dans le thème grâce à la carte et aux cartes événement, et ce même si les armées sont représentées par des cubes.

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2 Commentaires

  1. Grovast 15/09/2014
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    Merci pour cet intéressant aperçu qui donne une bonne idée de ce qu’est Unita.

    Par contre je n’ai juste pas saisi le but du jeu ; il faut arriver en premier au portail central, ou simplement réduire le plus possible les unités adverses ?

  2. Cormyr 15/09/2014
    Répondre

    En fait, il faut réduire le plus possible les armées car à la fin, elles passent toute le portail et on fait le décompte des forces et l’armée la plus puissante gagne !

     

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