Ce que nous apprennent les Unes de 2016

Partir à la recherche des couvertures de magazines ludiques publiées en 2016, et tenter de voir et d’entendre ce qu’elles nous racontent, fut une sacrée aventure. D’abord parce que le filon semble pratiquement inépuisable : il en est toujours une pour surgir que l’on avait oubliée, négligée, et des liens inédits s’opèrent entre elles. D’autre part, parce que le voyage est riche en découvertes : telle publication que l’on ignorait, tel jeu sous-exposé, telle manière de traiter un sujet de fond, telle capacité à provoquer des attentes en peu de mots.  

Au programme, donc, voici quelques tendances de 2016  vues à travers le prisme de « unes » marquantes. Il s’agit à chaque fois d’acteurs majeurs de la presse papier spécialisée dans le jeu de plateau. Ce sont des titres de langue française, anglaise et allemande, et, vu l’abondance de ce seul secteur, n’ont pas été inclus les proches cousins du wargame, de la figurine, du jeu vidéo, du jeu de rôles et des jeux d’esprit (mais nous y reviendrons).

 

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Jeu de plateau ? Jeu vidéo ? La frontière est mince.

 

So 90’s

Ce qui différencie internet et d’autres médias réside moins au fond dans le style d’écriture que dans des contraintes physiques et temporelles. Le web est /doit / semble être un flux continu, immédiat, ouvert, illimité alors que les magazines papiers sont fortement soumis à des contraintes de format (pages, signes), de production (impression, livraison, distribution), et, parfois, de temporalité (écart entre l’écriture et la lecture). Des contraintes de le presse papier naissent des scansions, des alternances, des temps forts et faibles.  
Ainsi, la “une” demeure vraiment une notion propre à ce domaine, qui prend encore plus de sens dans le cas des périodiques. Si un site internet met en avant à un moment T un événement, une personne, un jeu, jamais ces éléments ne resteront un, deux mois comme c’est le cas de Spielbox, Counter et autres. La pratique serait plutôt de mettre plusieurs news par pages et plusieurs pages par semaine.  

Dans ce contexte, « faire la une » est un vieux concept qui survit. La couverture prochaine est attendue.
Avant, on la découvrait chez le marchand de journaux ou à la maison en déballant l’emballage postal. Maintenant, c’est plus sûrement sur un réseau social qu’elle est dévoilée en premier. L’effet est le même cependant : la couverture fait événement. Surprise. Déception. Les « unes » gardent une forte portée symbolique, raison sans doute de leur subsistances en 2016.

 

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« Tiens, Mombasa en couverture du deuxième numéro de 2016 ? Oui, c’est logique au fond »

 

Biodiversité 

Au dernier décompte, fait grossièrement à la louche, on pouvait dénombrer entre soixante et cent couvertures de magazines pour l’année 2016.
Eclatées entre plusieurs titres, dont les plus productifs opèrent à un rythme mensuel. Le bimestriel est plutôt la norme et la publication apériodique n’est pas exclue. Certains ne sont pas datés. Toujours est-il qu’il s’agit d’un ensemble assez facile à circonscrire.  

Le premier constat serait là, d’ailleurs : en 2016, malgré la crise de la presse, en dépit des nombreux actes de décès de titres anciens, à l’encontre discours défaitistes, il y a encore un nombre de titres et de couvertures assez impressionnant consacrées à notre loisir. Même en se limitant aux trois langues suivantes : français, allemand, anglais, il y a encore un choix confortable de magazines. Peut-être est-ce juste une nostalgie générationnelle, peut-être que les jeunes balayeront tout ça. Il n’empêche.
Alors qu’il ne reste que quelques magazines papier en exercice consacrés au jeu de plateau (Spielbox, Fairplay, Plato, Tabletop magazine, etc), plusieurs autres continuent à emprunter la forme du papier en étant diffusé sur internet, dans des modèles gratuits ou payants.  
Internet alors est moins un concurrent qu’un espace de diffusion en masse. Cela nous vaut, bon nombre d’affiches. Game Nite Magazine, Counter (on en parlait ici), Tabletop Gaming, Casual Game insider, etc. Il y a de plus en plus de magazines « bi-médias », la plupart des publications papier s’offrant aussi en PDF ou sur une application. Plato à ce sujet constitue une exception.

 

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Jeunes pousses et vieux briscards

Un regard plus attentif sur les numéros de publication nous montre une coexistence actuelle de jeunes titres qui se sont lancés récemment sur le marché et d’autres qui sont dans le paysage depuis bien longtemps. D’un numéro 6 à un numéro 500, il y a un écart particulièrement fort. Casual Game Insider, TableTop Gaming, Tric Trac Magazine, qui tous viennent de 2015, apportent leur grain au moulin. Cela souligne à la fois la créativité du milieu, l’attrait commercial que représente le secteur du jeu et jouet, en même temps que la disparition de toute une génération intermédiaire (JDS mag de 2015, dont le retour a été évoqué en 2016). Il y a quelques titres de publi-reportage, mais la plupart ont une ambition critique, chacun avec une ligne éditoriale marquée. Ils convergent vers une présentation de jeux aux joueurs. Il n’y a pas – plus en fait, depuis la disparition de Jeux pro – de titres qui visent directement les professionnels.

 

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Numéro 16 de la revue Casual Game Insider

 

Cela laisse à penser que la forme magazine, avec sa hiérarchie de l’information, son organisation du texte et de l’image, ses limites, et donc, l’effet de la couverture et de la périodicité, a sans doute encore quelques beaux jours devant elle. 

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Le remarquable Game Nite Magazine

 

Le tamis des couvertures

Quatre, six, dix, douze couvertures par an, selon le rythme de publication de chacun, leur nombre est forcément limité. Quand des centaines et des milliers de jeux sortent, quand des auteurs, des illustrateurs, des éditeurs, des commentateurs se bousculent, c’est forcément opérer un choix, prendre un risque que d’exposer tel ou tel. C’est ce qui rend les couvertures aussi  significatives et précieuses : le tri qu’elles opèrent, les tendances qu’elles impriment. Qui revient souvent, qui est laissé de côté, c’est une première information.

D’autant qu’elles sont aussi, souvent, un choix commercial pour les magazines qui nécessitent une audience. La couverture doit donc trouver en permanence un compromis entre ce qui est attendu et ce qui pourrait surprendre. Si l’on regarde les dix couvertures de Plato de l’année, elles sont relativement peu surprenantes a posteriori : on y retrouve les hits attendus (7 Wonders Duel, Codenames, Pandémic Legacy, Time Stories, Imagine, Mare Nostrum) et heureusement quelques incartades (Captain Sonar, Le Tour du monde en 80 jours). 

Il est donc marquant de repérer les compromis qui sont trouvés à ce niveau, l’exposition d’un jeu plus aventureux ou au contraire celui qui est attendu. En particulier les compromis qui se logent dans le sommaire : « Ok, on fait la couv’ sur Scythe, mais on glisse au passage « The making of Codenames: how the soviet union, Monopoly and video games led to 2016’s best party game ». Ainsi, Jamey Stegmaier, le créateur de Scythe, s’il n’est jamais complètement sur le devant de la scène revient souvent par exemple.

 

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Esthétiques

Des couvertures, il y en a de très belles, il y en a aussi de particulièrement ratées. Cela commence par là, ce niveau d’appréciation très basique, sensoriel et physique. Il n’est pas question au départ d’une démarche intellectuelle ou critique. La “une” saute aux yeux, et la réaction est immédiate. Dans ce domaine, les professionnels et les amateurs éclairés co-existent. Il y a un savoir faire évident dans les titres les plus pros, qui fait qu’ils ratent rarement leur coup, mais il y a aussi, encore, le charme du bricolage, la subsistance du fanzine. Les logiciels de PAO se sont démocratisés depuis l’époque des feuilles de choux photocopiés, ce qui a tendance a niveler les formes et produire une sorte de qualité moyenne. Souvent, d’ailleurs, le « ratage » n’est pas tant lié au talent des graphistes qu’à la matière elle-même que la « une » prend pour base.

 

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Par exemple, Isle of Skye n’est pas très beau de nature à mon sens, et l’on doute qu’il ait pu faire une belle couverture. Kingdomino est assez joli, mais le détail, les contraintes d’information, les couleurs n’en font pas une belle couverture. Pourtant, ce sont deux choix courageux et marquants. 

 

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À l’inverse, il semble difficile de se rater sur une couverture Thunderbirds, 7 Wonders Duel ou le très beau Le Tour du Monde en 80 jours (plus belle couverture de Plato de l’année à mon sens). 

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Faire la couverture sur un jeu « moche » constitue donc un vrai choix. Il ne s’agit donc pas de faire un classement des plus belles couvertures de l’année. Parfois, les plus pertinentes ne sont pas les plus belles graphiquement.

Têtes de gondole

Autre constat qui s’impose assez vite : la plupart des magazines font le choix, classique, de mettre en avant un seul jeu. C’est le plus parlant, le plus attrayant visuellement, le plus repérable. La même chose se trouve dans la presse sur les jeux de rôle, le jeu vidéo, la musique. Cependant, on apprécie aussi des tentatives plus différenciées : Counter qui essaye de regrouper les jeux en tendance sans en mettre un plus en avant que d’autres, Game Nite qui joue sur l’énigme en ne titrant pas l’image, Fairplay qui part sur un dessin plutôt qu’une photographie, Tabletop magazine qui s’autorise parfois des articles tendances. La couverture signe une identité

 

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Couverture typique (et assez réussie) d’un numéro de Fairplay. Essen 2016

 

À coté du jeu mis en avant, la Une met plus discrètement en exergue d’autres éléments, souvent des dossiers, des interviews.   
Si les couvertures sont parfois un peu conventionnelles, c’est là qu’on va trouver la pugnacité du magazine, son identité. Ce n’est pas bien surprenant d’ouvrir sur « Scythe, jeu de l’année« , par contre c’est dans les sommaire qui sont affichés au devant que l’on trouve de petites pépites comme l’article sur le site de jeu en ligne Yucata.de dans le numéro de Game Nite présenté un peu plus haut.

 

Déterritorialisation

Comme évoqué ci-dessus, il faut souvent aller ailleurs pour être surpris, dérouté. La lecture de la presse étrangère, ou simplement la vision des couvertures, est une manière de relativiser la bulle dans laquelle on est placés. Découvrir qu’un jeu sur Les Tortues Ninja ou Walking Dead va sortir avec Tabletop magazine, revenir sur des choses anciennes avec Win, s’intéresser à de purs produits allemands avec Spielbox, etc. Même sans lire le magazine, pour des raisons de temps ou d’argent, cela donne des indications, des envies. Casual Game insider, qui produit un numéro par saison, est le plus surprenant en la matière. Il n’a sorti que des titres assez ignorés ici. 

 

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« Non, mais c’est quoi ces trucs ? »

 

Enfants concrets

L’une des tendances fortes de 2016 semble être l’affichage accru des jeux enfants.

 

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Stone Age Junior et Les aventuriers du rail : mon premier voyage ont chacun eu droit à leur couverture. Ce n’est pas rien tant elles sont généralement et historiquement sous représentées. Il y en a eu beaucoup plus en 2016, bon deux ou trois, mais cela n’en reste pas moins un bond majeur, un marqueur important. Au delà de l’affichage, le traitement est différent, plus approfondi, à l’image même des jeux produits qui semblent muter. La même analyse pourrait être faite concernant les jeux à deux, avec notamment 7 Wonders duel.

 

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Par contre, on notera la disparition, l’enfouissement des jeux abstraits. Par exemple, que Le Projet GIPF qui est ressorti cette année n’a fait l’objet d’aucune couverture, alors qu’on pourrait le penser plus fondamental que pas mal des titres à thèmes qui se sont retrouvés en une. Difficile de savoir si c’est son statut de réédition ou de jeu abstrait qui lui vaut cette non-exposition. Dans les deux cas, ce ne sont pas des éléments vraiment favorables à une présentation en couverture : mieux vaut être, en 2016, pourvu d’un thème, d’un auteur et être un produit neuf. 

 

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L’une des rares couvertures consacrées à un jeu abstrait

 

Ameritrash et résistance

C’est un peu plus qu’une coïncidence : en décembre, Plato annonce Conan, Spielbox Fortunes de mer et son extension, Ravage Plateau: Demeures de l’épouvante seconde édition. Certes, deux d’entre ces magazines verront le jour en 2017. Il n’en reste pas moins que cela témoigne d’une forte montée en puissance d’un genre, de jeux beaucoup plus incarnés.  

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Que vois-je ? Un jeu purement américain dans un magazine très allemand ?!

 

Que des magazines comme Counter fassent une majorité de couvertures sur la SF n’est pas une surprise, mais dans le cas de Spielbox, c’est plus étonnant de voir ce gros jeu mis en avant. Les couvertures, comme pour le jeu enfant, comme pour le jeu abstrait, ne sont là qu’un reflet. Rappelons-le : cela se fait dans un contexte de place limitée et de choix commerciaux. Quand on voit la dernière couverture du magazine WIN, qui fait, à la même période approximativement, la part belle à l’énorme jeu de Rosenberg, Feast of Odin, on se dit que les temps changent. À une autre époque, il aurait été sur le devant de la scène, dans d’autres publications majeures. Là, il est en périphérie. Dans tous les cas, ces couvertures montrent l’inflation.

 

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Intemporel

 

Incursions

L’année fut marquée parla publications de hors série : celui de Ravage (1 numéro publié à Cannes, 1 annoncé, et une vocation à se pérenniser) et de Canard PC (1 hors série ponctuel suivi d’un numéro sur Donjons et Dragons, et des questionnements sur la suite). Deux titres majeurs dans des domaines voisins (la figurine et le jeu vidéo) qui ont investi le domaine du jeu de plateau. Ravage avait prévu d’en sortir un aux alentours de Cannes, l’autre vers Noël. Le second ne sera finalement publié qu’en 2017. Il n’empêche que cela fait une couverture de plus, et qu’elle est vraiment réussie. La maquette est toujours aussi efficace, et ils ont trouvé une astuce : prendre le beau Abyss pour faire le pont entre leur monde habituel et le jeu de plateau. Un choix étonnant. L’image qu’ils en donnent est trompeuse, mais réussie. Les demeures de l’épouvante fait la couverture du numéro 2, tout aussi réussie. Une nouvelle couverture est de toute façon enthousiasmante.

 

 

 

Indéfinissable et omniprésent

Incursion toujours, mine de rien, Tric Trac Mag a sorti trois numéros en 2016. Avec à chaque fois un auteur français en couverture et un entretien. Cannes, Noël, des moments marquants. Il est difficile de le mettre dans le même sac que les autres, car cette publication de Origames emprunte la forme d’un magazine mais se situe plus du côté du catalogue d’un point de vue éditorial, mais il est difficile de ne pas l’évoquer non plus. Esthétiquement et dans le fond, ce n’est pas toujours à mon goût, même si cet entretien avec Fred Henry était plutôt bien, mais il se signale par sa puissante diffusion. Car, soyons clair, il a sans doute été, sinon le plus lu, du moins le plus distribué, par rapport aux titres évoqués ici. Ce qui est tout sauf négligeable.

 

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500

L’un des attraits des couvertures ce sont aussi ces titres qui claquent, plus ou moins drôle, plus ou moins heureux. Un de ceux que j’ai adoré:

Heaven or Hell: 1522 new games by 1054 designers, from 511 publishers, with 1470 pictures – now in WIN 499

 

D’ailleurs, nous avons eu en 2016 (novembre), la 500eme une du magazine WIN qui a également fêté ses quarante ans d’existence. C’est tout bonnement impressionnant. 

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Un numéro 500 tourné vers le futur plus que vers le passé

 

2017…

Bien malin celui qui sera en mesure de dire ce que l’avenir nous réserve. De nouveaux titres ? Des disparitions ? La pérennisation de Ravage Plateau ? Un Canard PC qui retente le coup ?
Toujours est-il que 2015 et 2016 furent, après la sinistrose de la disparition de quelques titres, des années plutôt excitantes en la matière. Les premières « Unes » de 2017 ne devraient pas tarder à arriver. Que nous réservent-elles ? Celles de l’année qui se referment sont, comme nous l’avons vu, riches d’enseignements : vitalité du marché, émergence de nouveaux acteurs, une place plus sérieuse pour les jeux enfants et, globalement, des jeux à thème fort qui se dessinent. Par ailleurs, Internet qui a longtemps été pensé comme un concurrent, s’avère de facto un partenaire idéal pour diffuser plus largement une passion qui transpire toujours autant de ces pages confectionnées avec soin. 

 

 

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9 Commentaires

  1. 6gale 11/01/2017
    Répondre

    Vraiment dommage que Plato ne sorte pas en PDF. Le principal problème du magazine dans sa forme papier, c’est le stockage… J’ai arrêté d’acheter Plato pour cette raison.

    • Vlan 18/01/2017
      Répondre

      alors que moi, c’est tout l’inverse : j’avais arrêté lorsqu’il ne sortait plus qu’en pdf…

  2. Shanouillette 11/01/2017
    Répondre

    Merci pour ce billet passionné, ce regard transversal sur les unes de l’année ! Que l’ameritrash du gagne du terrain, ça c’est aussi un truc qui m’avait sauté au visage dans le bilan de l’année.

    Je reviens sur un élément évoqué qui me parle particulièrement. Les contraintes de la presse papier sont en effet très différentes de celles du web. On attend la prochaine Une d’un mag, qui comme tu le dis marquera une période et fera la surprise alors que le web s’inscrit dans un flux continu.

    Ceci dit, pour ce qui est de Ludovox (je parle modestement de ce que je connais) on a aussi l’option de mettre des articles et des événements en avant. Je suppose que ce que je veux dire, c’est que tout n’est pas qu’immédiateté et course en avant.
    Par exemple, quand un article est publié, il reste en page d’accueil (= notre sommaire du moment) pendant environ 15 jours, puis, selon les cas, on dit qu’il « passe en slider » (cette zone tout en haut de la page d’accueil avec des images tournantes) qui est en quelque sorte la « Une » du site.

    Cela permet de mettre en avant certains contenus pendant un mois, voire plus. Cela permet aussi de remettre en « une » des articles parus il y a longtemps, qui reviendraient dans l’actu pour une raison ou une autre.

    Ainsi, pour nous, « faire la une » est en effet un « vieux concept qui survit » (pour reprendre tes justes mots) et ce, même au-delà du papier, en connaissant une adaptation certaine au passage. Je pense ainsi que certains articles et événements marquent notre année nous aussi, à notre façon. 

  3. Damien Andre 12/01/2017
    Répondre

    Je vois la nuance que tu tentes d’apporter, et pour une part j’y souscris. C’est vrai que vous ne cédez pas, ici, à la tentation du frénétique. Néanmoins, le nombre de « unes » des sites internet est sans commune mesure avec ce qui se pratique dans le papier, et je pense vraiment que la rareté, le choix, le rythme, ont leur effet. D’autre part, structurellement, l’organisation des sites internet, je vois cela comme un « card row » à la Through the Ages, soit un déroulement horizontal  alors que les magazines sont une pyramide: un sommet, des déclinaisons hiérarchiques. C’est pour cette raison que si l’on devait attraper ce qui a fait la « une » de Ludovox en 2016, l’exercice serait bien plus complexe. Non ? De manière plus affective, j’ai passé la moitié de ma vie sans internet, et les expériences précoces impriment plus le cerveau. Recevoir à la maison BEST puis les inrocks mensuels  (sur la fin) m’a durablement marqué.

    • Shanouillette 12/01/2017
      Répondre

      J’y ai jamais tellement réfléchis de cette façon, d’ailleurs j’ai toujours été abonnée à des mag et je connais la joie de découvrir une nouvelle « Une », mais ma culture ludique s’est quant à elle majoritairement construite sur internet. #patapé

      Je sais que nous avons aussi nos moments forts et nos temps faibles sur Ludovox : ils se calent notamment sur le calendrier ludique annuel, à l’approche de Cannes et Essen se situent les pics d’activité du site, le temps faible serait le milieu de l’été, quand il n’y a presque plus d’activité sur le marché, car tout le monde est en vacances (éditeurs comme lecteurs).
      Du coup si je devais attraper des espèces de « Unes » je commencerais simplement par là je suppose…

      Un article comme celui que nous avons paru sur Codenames est resté un très grand nombre de jours cumulés en slider (suite à la parution VO puis VF, coup de coeur rédactionnel, grand nombre de vues lié à l’intérêt spontané pour le jeu et le spiel) j’imagine qu’il pourrait être considéré comme une « Une » de l’année chez nous.
      En effet, et je souscris bien à ce que tu décris, c’est moins l’évidence que sur un mag où c’est clair que devoir choisir en amont ce qui fera la « une » par l’équipe est une autre démarche et doit sûrement être un choix épineux.
      J’imagine qu’on pourrait tout de même faire un article un peu analogique à celui que tu as écris ici avec les contenus qui ont le plus cartonné sur le web ou sur un site ludique particulier, ça serait probablement plus complexe mais ça pourrait être intéressant de voir ce qui ressort.

      En tout cas c’est une excellente nouvelle de voir que la presse spécialisée se maintient très bien et j’apprécie le constat que tu fais, qui met en exergue le fait qu’internet n’est pas un concurrent (je pense qu’il aurait déjà tué tous les mag si ça avait été le cas) mais bien un allié sur lequel elle peut compter pour se développer.
      Je crois beaucoup que les médias d’informations se complètent, et doivent se penser comme les pièces d’un puzzle avec lequel un joueur doit jouer.

       

  4. TheGoodTheBadAndTheMeeple 12/01/2017
    Répondre

    As-tu des chiffres du nombre d’abonnés sur les différentes revues ? qui donnerait plus de cadre a ton analyse.

  5. Damien Andre 12/01/2017
    Répondre

    C’est vraiment délicat les chiffres dans la presse, encore plus que dans l’industrie du jeu. Mais je vais me renseigner pour un prochain article ainsi que sur les lignes éditoriales.

    Pour te donner un exemple, si tu veux un chiffre, Tric Trac a communiqué sur Tric Trac Mag: 25000 exemplaires distribués. Je cite:

    « Si on parle de jeu de société pur, il s’agit probablement du plus gros tirage de tous les temps. Oui madame. Monsieur Vincent Vandelli qui gère tout cela de main de maitre nous dit même qu’avec un taux de circulation proche de 4 et en additionnant les 6000 versions téléchargées en PDF  attendus on atteindra les 100 000 personnes touchées par ce mag !!! C’est beau. »

    « L’article » « complet » sur « le magazine » se trouve ici, ainsi que les réactions de la population locale et des forces de l’ordre.:

    https://www.trictrac.net/actus/tric-trac-mag-6-le-numero-de-noel-gratuit-qui-pete-les-records

    Bref, tout cela est aussi signifiant que « les chiffres du chomage » qui sont relayés par les médias, ou les manifestations « selon la police », « selon les manifestants ».

    Pour les autres, je pense qu’entre les exemplaires imprimés, les fluctuations du tirage d’une fois sur l’autre, ce qui est distribué à l’unité, les abonnements, les PDF, les versions internationales, et surtout ce qui est réellement lu au final, il y a de quoi s’y perdre. Et la communication de ces gens (qu’ils soient une entreprise commerciale ou une entreprise de passionnés) te donnera seulement un indice, un ordre de grandeur. Parce que tu peux partir du principe, qu’ils seront toujours plus ou moins exagérés, mais que comme ils exagèrent tous de la même manière la hiérarchie devrait se retrouver. Il y a de plus gros menteurs, des menteurs plus efficaces, mais ça donne une idée.

    Outre que certains (Counter) ont abandonné l’abonnement, un abonné institutionnel (genre ludothèque) à un magazine papier n’est pas comparable en termes d’impact avec un geek qui télécharge tout ce qui passe.

    Et puis, pour cette fois, ce n’était pas un article de fond, je voulais un truc un peu émotionnel, pas cadré justement, sans analyser.

    Que Game Nite soit téléchargé 1, 10, 100, 1000 fois ou plus est intéressant dans l’absolu, mais cela n’enlève rien au propos: un mec s’est dit en 2015, allons y, je vais leur montrer, et il est encore là en 2016. Il balance un style de couverture assez original où le jeu se laisse deviner, et, ce faisant, apporte quelque chose.

    Je me faisais la remarque d’ailleurs, en relisant le critique rock des années 70 Lester Bangs (Psychotic Reactions et autres carburateurs flingués), que les années 2010 sont un peu trop obésédées par le « fact checking »/ les chiffres, et que cela nous amène parfois des articles appliqués mais un peu automatisés de Libération à Canard PC spécial plateau. Des articles qui donnent l’illusion de l’objectivité, d’un appui sur la réalité et de la mise en conflit de positions différentes, alors que ce n’est vraiment pas le cas.

  6. d’Epenoux 15/01/2017
    Répondre

    Les 100000 lectures pour TRITRAC MAG c’est soit une blague, soit un énorme mensonge…

    • Sha-Man 16/01/2017
      Répondre

      Il y a une part de marketing dans la formulation certainement.

      Il y a 25 000 exemplaires pour le tirage ça c’est un fait. Ensuite le taux de circulation sur chaque exemplaire à 4, ce serait intéressant de savoir comment il est mesuré / calculé…

      Et pour atteindre 100 000 « lectures », la formule me parait un peu casse-gueule quand on voit qu’au lieu de multiplier les tirages par 4, dans la presse classique on va plutôt les diviser par 4, avec 75% de retours invendus.

       

      Encore une fois, il y a des faits qui sont incontestables ici (le tirage et la distribution), l’interprétation de la portée et de l’engagement réels des gens autour du produit sont plus contestables.

      Déjà que c’est pas facile à mesurer sur le web alors qu’on a tous les éléments informatisés pour le suivre, pouvoir le mesurer sur du papier, non vendu et sans indicateur de retour, ça me parait illusoire.

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